Audi A2 1.4 FSI, L’incomprise…
La vie d’Audi n’a pas toujours été un long fleuve tranquille, et il y a eu par le passé quelques flops commerciaux. C’est le cas de la petite A2 qui a commencé sa carrière en 2000 en France. Malgré son avant-gardisme, une phrase peut résumer le parcours de cette citadine : « trop tôt, tôt innovante, trop chère ». A partir de là, son sort était déjà scellé…
Par Jimmy Méloni, photos Arnaud Taquet
En bref
Audi A2, citadine lancée en 2000
Carrosserie et structure ASF
Modèle essayé : 1.4 FSI 75 ch
Production de 2000 à 2005 à 176 377 exemplaires
L’A2 commence sa carrière chaotique au tournant des années 90 et 2000, après une étude de style qui a commencé en 1996. Le projet baptisé « AI » était porté par Stefan Sielaff dont la principale idée était de réaliser un concept car qui allie espace et légèreté. Pour cela, il utilise massivement l’aluminium, un matériau léger et rigide qu’Audi maîtrise parfaitement depuis la première A8 de 1994, mais aussi le plastique (structure Audi Space Frame). L’auto est présentée au Salon de l’automobile de Francfort-sur-le-Main en 1997. Les deux designers reçoivent même le prix du design allemand en 2002 récompensant leur travail de conception.
› Lancée en 2000, la petite A2 se posait comme un monospace citadin vraiment avant-gardiste. Trop pour la clientèle…
Tout était prêt pour s’ouvrir sur le marché des citadines premium. Audi voulait en effet mettre en avant son savoir-faire et sa qualité de fabrication en y ajoutant des innovations avant-gardistes. Audi s’était attaqué depuis les années 80 à asseoir son image de constructeur haut de gamme à travers des modèles emblématiques comme l’Audi A8 qui a, elle aussi, une structure en aluminium ou encore des modèles sportifs badgés S et RS. Toute une gamme de modèles « premium » a vu le jour chez le constructeur d’Ingolstadt. Le but avoué était bien sûr de se mettre au même niveau que les deux rivaux allemands de toujours, Mercedes et BMW. D’ores et déjà ces deux-là avaient eu l’idée de construire des citadines comme la Classe A apparue à la fin des années 90 ou encore la Mini, que BMW a rachetée à Rover et qui lui permet de disposer très rapidement d’une citadine compacte et haut de gamme au début de l’année 2000.
Tout d’une grande !
Le contexte ne pouvait pas laisser indifférent Audi qui ne disposait jusqu’alors que de l’A3 en voiture compacte. Alors, quand apparaît la plus petite A2 (3m83), les cadres de chez Audi sont sûrs de leur coup. Ils avaient déjà à leur actif l’Audi TT, un superbe coupé 2+2 plutôt aux lignes futuristes pour l’époque dont l’A2 s’en est inspirée fortement pour ses optiques et sa face avant lisse et rondouillarde. Tout était réuni pour frapper fort sans compter les innovations que la citadine avait intégrées. Il y a donc d’abord cette ligne qui ne ressemble à aucune autre. On aime – ou pas – mais l’ensemble ne peut laisser indifférent. La citadine compacte et trapue avait l’aspect d’un petit monospace qui pouvait facilement se faufiler en ville. Sa structure en alu est une première sur ce genre de véhicule pour plus de légèreté. L’A2 ne pesait ainsi que 895 kilos pour la version essence et 1030 kilos pour la version diesel, soit des masses comparables aux autos des années 70-80. Le Cx, le coefficient de pénétration dans l’air très bas, est de surcroît de seulement 0,25. Voilà un cercle vertueux, qui va dans le sens de faibles consommations. Surtout que l’A2 mettait d’emblée toutes les chances de son côté sur le plan mécanique pour faire très fort sur ce plan-là.
› L’A2 dispense des performances suffisantes et séduit d’abord par sa belle frugalité !
En effet, sa version diesel 1,4 litre (TDI) reposait sur un frugal moteur trois cylindres qui consommait peu. Il existait même un bloc de 1,2 litre surnommé « 3 litres » car il ne consommait que… 3 litres aux 100 kms. Un record ! A l’époque, ce type de motorisation était avant-gardiste et Audi ne s’est pas privé de la faire ensuite briller au plus haut niveau en Endurance sur ses protos du Mans. Bien née, l’A2 était en avance également sur son temps avec des émissions de CO2 qui flirtaient avec les 81g/km, lui permettant ainsi d’être conforme à la norme antipollution Euro 3. Aujourd’hui encore, un tel score sans hybridation laisse rêveur et permettrait à l’A2 d’échapper à tout malus ! Pour aller jusqu’au bout de la démarche, les ingénieurs maison ont même greffé un stop and start et une boîte de vitesses automatisée via un sélecteur de vitesses. Cependant, pour maîtriser au mieux sa consommation, la version diesel 1,2 litre ne disposait ni de climatisation, et ni de direction assistée. Mieux vaut opter pour un bloc plus volontaire, comme ce 1.4 FSI (essence) de 75 ch ici à l’essai, certes un peu moins frugal, mais bien plus fréquentable !
A l’intérieur, l’impression d’espace était bien réelle, avec une modularité bien pensée. Les sièges arrière étaient modulables et repliables pour obtenir un plancher plat. L’accessibilité au coffre était par ailleurs facilitée par la présence d’un large hayon. Pour accentuer l’impression d’espace l’habitacle disposait d’une surface vitrée importante, et notamment jusque sur le hayon dont la lunette remontait sur une partie inférieure du toit pour laisser entrer la lumière. L’équipement était par ailleurs plutôt généreux car sur la version de base Advance, on disposait de la climatisation automatique, tandis que la version High-Tech se paraît d’un toit panoramique en verre qui pouvait s’ouvrir, inondant encore un plus de lumière l’intérieur. Quant à la version S Line Sport, elle mettait davantage l’accent sur le côté dynamique de l’auto à travers la monte de jantes de 17 pouces, mais aussi de sièges et d’un volant sport. Cette petite Audi, sûre de sa fiabilité, avait également été pensée pour les citadins qui rechignent à ouvrir un capot pour vérifier la mécanique. Sur l’A2, il fallait juste ouvrir une petite trappe intégrée à la calandre et on pouvait juste contrôler les niveaux d’huile et de liquide de refroidissement, et éventuellement faire un complément très facilement. Bien équipée, innovante, spacieuse, lumineuse et dotée d’une finition sérieuse cette citadine qui avait bien « tout d’une grande » sur le papier, semblait avoir tout pour réussir. Ce concentré de technologie et son style novateur devaient propulser l’A2 au firmament des ventes. Mais tout ne s’est pas déroulé selon les plans échafaudés par Audi…
› L’intérieur, vaste et lumineux, se montre agréable à vivre et bénéficie d’une finition sérieuse.
Ephémère A2
En effet, de 2000 à 2005, seulement 176 377 exemplaires ont trouvé preneur. Un flop ! L’A2 a clairement loupé sa cible et n’a pas su séduire comme espéré une clientèle urbaine aisée. La faute principalement à sa conception en aluminium qui a fait peur à certains, car en cas de choc, le prix des réparations – à faire uniquement chez des spécialistes de ce matériau, est forcément élevé, l’aluminium demandant des qualifications spécifiques aux carrossiers. Et pour ne rien arranger, il faut avouer qu’en utilisation journalière, l’A2 est très ferme à conduire. La coque alu rigidifie considérablement l’auto, et à l’époque, Audi ne maîtrisait pas aussi bien la filtration des trains roulants qu’aujourd’hui. Croyez-moi, les imperfections de la route se font bien sentir dans les lombaires ! Par ailleurs, à l’usage, l’A2 cumule quelques problèmes et ne se montre pas aussi fiable que ça. Les bobines d’allumage lâchent parfois et pire, le toit ouvrant Open Sky peut se bloquer en position ouverte. Un inconvénient majeur car si le garage peut le refermer manuellement grâce à une manivelle cachée par les pare-soleil, le remplacement du système d’ouverture est, lui aussi, hors de prix. Enfin, à la conduite, l’autre souci de l’A2 reste les épais montants présents de chaque côté du pare-brise qui masquent la visibilité aux angles gauche et droit. Plutôt gênant pour une auto censée évoluer souvent en ville… Reste qu’avec ce volontaire 1.4 FSI de 75 ch, la petite A2 offre un agrément de conduite honorable, et reste alerte sur route en s’évadant des villes.
› Le capot avant, scellé, ne peut s’ouvrir qu’en atelier, mais les goulottes de remplissage pour faire les niveaux sont accessibles en faisant basculer la calandre pleine.
Mais ce qui a surtout dissuadé les acheteurs, c’est le tarif, très… premium ! A son lancement l’A2 est proposée à 129 900 francs, autrement dit 19 800 euros. Un tarif jugé prohibitif à l’époque comparé à une A3 mieux finie et plus grande, bref plus polyvalente. Comme les ventes stagnent en France, Audi décide de baisser le prix en 2001, qui atteint tout de même 115 400 francs de l’époque (soit 17 600 €). Ce n’est pas suffisant pour inverser la tendance : le sort de l’A2 est déjà scellé. Avec cette citadine trop innovante – en avance sur son temps, et surtout trop chère à produire, Audi perd de l’argent, environ 5000 euros par exemplaire, et la firme d’Ingolstadt décide de jeter l’éponge en 2005. L’éphémère petite A2 n’aura vécu que cinq ans seulement, sans véritablement rencontrer son public, ni avoir de remplaçante directe. Un échec cuisant car Audi mettra du temps avant de proposer une citadine sur le marché. Il faudra attendre l’inédite A1 en 2009, bien plus conventionnelle en apparence et sur le plan technique, mais bien calibrée face aux attentes de la clientèle. Cette fois-ci, le défi sera relevé avec succès !
L’avis d’Avus
Trop chère en neuf à cause de sa conception avant-gardiste, l’A2 a eu tort d’avoir raison trop tôt, car aujourd’hui, il ne fait aucun doute qu’une auto polyvalente légère et économe en carburant – donc peu polluante – trouverait un plus large public. D’ailleurs, le temps semble lui donner raison, car si la première Mercedes Classe A – sa rivale directe à l’époque – ne vaut plus grand-chose en occasion, ce n’est pas du tout le cas de l’A2 qui tient très bien la cote ! A vous de vous montrer malin et de vous mettre en quête d’un bel exemplaire qui fera assurément une très bonne seconde voiture au quotidien !
« La petite A2 aura été une étoile filante à la vie bien courte : à peine 5 ans de carrière et moins de 180 000 exemplaires écoulés ! »
On aime :
• Rapport encombrement habitabilité
• Sobriété des moteurs
• Performances honorables
• Agile en ville
• Qualité de l’ensemble
On aime moins :
• Ligne de monospace
• Chère à réparer en cas d’accrochage
• Cote soutenue
Fiche technique Audi A2 1.4 FSI (essence) :
Moteur : 4 cylindres en ligne transversal avant, 1390 cm3
Puissance maxi (ch à tr/mn) : 75 à 5000
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 126 à 3800
Transmission : aux roues avant, boîte manuelle à 5 rapports
Freins : Disques (AV et AR)
Dimensions L x l x h (m) : 3,83/1,67/1,55
Poids (kg) : 895
Réservoir (litres) : 34
Pneus AV/AR : 175/60 R 15
Vitesse maxi (km/h) : 173
0 à 100 km/h (sec) : 12