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25 ans de Audi RS4 « B5 », Family business

Qui a dit que les voitures sportives étaient fatalement égoïstes ? Certainement pas Audi qui, depuis une certaine RS2, s’est fait le spécialiste des breaks qui déménagent. La preuve avec cette RS4 « B5 », la première d’une longue lignée apparue voilà 25 ans…

Texte et photos Joseph Bonabaud

En bref
1ère Audi RS4
Modèle qui fête ses 25 ans
Moteur V6 3.7 biturbo de 380 ch
Cote 2024 : 35 000 € en parfait état d’origine

Aller là où personne ne vous attend, telle a été la stratégie élaborée par Ferdinand Piëch, en charge de la destinée d’Audi depuis 1976. Lorsqu’il prend la direction du bureau d’études, Audi est encore une marque généraliste de second plan, à vrai dire plus au niveau de Ford et Opel que de BMW ou Mercedes. Pour gravir les marches du premium, le bon Docteur Piëch, en tant que fin ingénieur et grand connaisseur de la chose automobile, va administrer des traitements de choc, qui vont contribuer à élever Audi au rang des meilleurs, en un temps record. Le premier étage de sa fusée est la fameuse Ur quattro, mise sur orbite en 1980. Il s’agit d’un grand coupé traditionnel en apparence, mais vraiment révolutionnaire avec sa transmission intégrale permanente associée à un moteur turbo à 5 cylindres atteignant le seuil symbolique des 200 ch. Ce qui aurait pu rester une bonne idée ignorée de tous va, au contraire, faire la renommée de la marque partout dans le monde grâce à un engagement en rallye au plus haut niveau. Avec le succès que l’on sait !

25 ans de Audi RS4 « B5 »

› Le break RS4 cache bien son jeu : sous son capot sommeille un V6 2.7 biturbo de… 380 ch capable de faire jeu égal en performances avec une Porsche 911 de l’époque !

Voilà qui va permettre à Audi de gagner en respectabilité… et en notoriété. Le second étage de sa fusée est la surprenante RS2, lancée en 1994. La RS2 a en effet de quoi surprendre puisque sur la forme, on a un classique break familial. Mais elle cache bien son jeu car, sur le fond, la RS2 se pose comme une authentique sportive en mariant son 5 cylindres « turbo » revu et corrigé par Porsche poussé à 315 ch, à la fameuse transmission intégrale quattro, devenue la marque de fabrique d’Audi. Accessoirement, elle inaugure le sigle « RS », désormais réservé aux dérivés les plus sportifs de la marque aux Anneaux. Bien que relativement confidentielle (2891 exemplaires), l’éphémère RS2 va marquer durablement les esprits et ouvrir la voie à une espèce bien singulière : celle du break sportif. Je dis « singulière » dans la mesure où ce genre d’auto associe des genres que tout semble opposer, une sportive étant par nature puissante, légère et exigüe, et même luxueuse dans le cas d’une GT 2+2. Mais certainement pas assez accueillante pour embarquer confortablement sa petite famille en week-end, voire même un gros chien dans le coffre si besoin ! Après le succès de la RS2, Audi va donc confirmer l’essai, mais à plus grande échelle cette fois. Le constructeur aux Anneaux décline le concept un cran au-dessus, en lançant en 1999, voilà tout juste 25 ans, la RS4 première du nom qui nous intéresse ici.

25 ans de Audi RS4 « B5 »

25 ans de Audi RS4 « B5 »

› Assez sobre en apparence, cette RS4 dispose tout de même de nombreux éléments distinctifs, dont des ailes subtilement élargies et des boucliers spécifiques.

Cette fois, Audi a pris pour base sa nouvelle A4, une berline proposée également en break, chargée de succéder, depuis 1994, à l’historique « 80 ». Et contrairement à la RS2, cette RS4 « B5 » a été entièrement conçue et développée en interne par « quattro GmbH », le département sportif aux Anneaux (rebaptisé depuis « Audi Sport »). Enfin, presque entièrement, puisque le moteur, un noble V6 2.7 litres biturbo emprunté à la S4, a été en partie affûté par les motoristes de Cosworth, la célèbre société appartenant alors au puissant groupe Volkswagen. Si Cosworth se charge de couler la nouvelle culasse et d’assembler le moteur, « quattro GmbH » conserve un droit de regard sur la mise au point, et a développé pour l’occasion de nouveaux conduits d’admission, des tubulures de guidage de l’air élargies et une ligne d’échappement inédite. La pression des turbos est poussée à 2,2 bars avec un remplissage optimisé grâce à de nouveaux échangeurs thermiques. On passe ainsi de 265 ch à 380 ch atteints à 6100 tr/mn au lieu de 5800 tr/mn. Pas mal pour un break familial !

25 ans de Audi RS4 « B5 »

› Cette génération s’en remet à un sublime V6 suralimenté coiffé de carbone… comme sur le modèle actuel. Mais celui-ci a été mis au point par le spécialiste Cosworth, et accepte un régime maximum de 7400 tr/mn !

Balle de break !

Comme son prédécesseur, la RS4 n’est disponible qu’en break, une singularité toujours unique à l’époque, la rare concurrence du moment incarnée par les BMW M3 et Mercedes C43 AMG se limitant à de plus classiques carrosseries de coupé ou de berline. Bien sûr, en tant que digne variante RS, cette « balle de break » n’a plus grand-chose à voir avec la bétaillère TDI du voisin. Ni avec une S4 qui a servi de base de développement. Malgré une relative discrétion, on voit bien qu’elle est passée par la salle de « muscu ». Outre des ailes sensiblement élargies (de 34 mm à l’avant et de 32 mm à l’arrière), indispensables pour accueillir de belles jantes spécifiques et alliage de 18 pouces, la voiture reçoit des boucliers sensiblement modifiés. Celui situé à l’avant comprend des ouïes latérales, indispensables pour dissiper la chaleur des échangeurs air-air des turbos KKK, tandis que celui placé à l’arrière intègre deux généreuses sorties d’échappement ovales. Et, petite touche distinctive qui a son importance, la coque des rétroviseurs extérieurs est en aluminium brossé, tandis qu’un logo suggestif « RS4 » est apposé sur la calandre et le hayon. On est donc bien loin du look volontiers tapageur qui caractérise les Audi RS d’aujourd’hui… et d’ailleurs l’essentiel des rivales de ce calibre.

25 ans de Audi RS4 « B5 »

Cette sportivité sobre et de bon goût se décline avec bonheur dans l’habitacle. Dès l’ouverture des portes, les seuils de portes siglés « RS4 » indiquent que vous pénétrez à bord d’un modèle d’exception, chose qui se confirme en un rapide coup d’œil. Outre de sublimes sièges Recaro enveloppants habillés de cuir offrant un maintien parfait, la RS4 bénéficie de jolis inserts en carbone véritable courant de la planche de bord aux contre-portes. Le volant sport en cuir offre une prise en main parfaite, tandis que le combiné réservé à la vitesse donne le vertige, en indiquant… 310 km/h ! Et puis il y a cette finition vraiment au-dessus du lot, l’une des obsessions de Piëch, qui a tant fait pour la renommée de la firme d’Ingolstadt. Outre des plastiques moussés à souhait, force est de constater que tout est parfaitement assemblé : un quart de siècle après, rien n’a bougé ! Cette RS4 fait honneur à la fameuse « deutsche Qualität », et on aimerait bien que les dernières réalisations aux Anneaux, moins rigoureuses, s’en inspirent ! Enfin, dernier détail qui a son importance à une époque où l’automatisme prend de plus en plus le pouvoir, cette Audi survoltée n’est proposée qu’avec une bonne vieille « boîte à poigne » à 6 rapports, un élément crucial pour les amoureux de la conduite sportive. Car, vous vous en doutez, ce break s’adresse bien à cette clientèle exigeante…

25 ans de Audi RS4 « B5 »

25 ans de Audi RS4 « B5 »

› Sièges Recaro ultra-enveloppants en cuir, inserts en carbone et instrumentation pléthorique sont de rigueur. Quant à la finition, elle laisse toujours autant rêveur…

Le break qui déménage !

Dès les premiers kilomètres, on est saisi par cette sensation de puissance qui paraît infinie. La transmission intégrale offrant un grip remarquable de tous les instants, y compris sur sol mouillé, le V6 déroule sans faiblir son couple impressionnant de 44,9 mkg, et ce, dès 2500 tr/mn. Cela se traduit par une accélération saisissante et constante, mais sans effet « turbo » à l’ancienne, marqué comme sur une RS2. La poussée se fait franche, avec seulement 5,5 sec pour effacer l’exercice du 0 à 100 km/h, la borne kilométrique étant saluée au bout de 24’’6, soit des temps comparables aux meilleurs GT de l’époque. Forcément, à force de vous projeter avec une telle vigueur à travers le paysage, mieux vaut garder les deux mains sur le volant, et ne le lâcher que le temps nécessaire pour passer à la volée une vitesse, chose que la boîte bien guidée et étagée tolère parfaitement. Dès la 5e, on atteint déjà les 250 km/h (vitesse autolimitée), mais on sera tout de même heureux de passer la 6e pour abaisser un peu la consommation moyenne. Car en « arsouillant », celle-ci dépasse facilement les 20 l/100 km, vidant les 62 litres du réservoir en moins de 300 km. Voilà qui est du niveau d’un déplaçoir électrique me direz-vous, mais au moins, on « recharge » facilement n’importe où à coup de sans-plomb 98 en à peine 5 minutes !

25 ans de Audi RS4 « B5 »

› Gaz à fond, une RS4 peut rivaliser avec une Porsche 911 ou Ferrari Modena de l’époque. Un seul chiffre à retenir : le 0 à 100 km/h est expédié en 5,5 secondes !

Véritable TGV de l’asphalte sur voies rapides, la RS4 est une infatigable machine à voyager vite et en totale sécurité, le tout dans un niveau de confort très acceptable. Presque trop d’ailleurs, car sur le réseau secondaire, dans les virages serrés, le poids conséquent du moteur placé en porte-à-faux sur le train avant se fait sentir, avec une fâcheuse tendance à plonger au freinage et à pomper sur mauvais revêtement. Dommage qu’Audi n’ait pas profité de l’occasion pour rigidifier le châssis de la S4, resté pour l’occasion inchangé. Mais la monte de pneus plus larges et surtout celle de 4 disques ventilés plus généreux permet de toujours rester au contact de la route et de « jeter l’ancre » en cas de besoin. Justement, le réservoir est encore presque vide et une station est en approche. Vite, un ravitaillement de plus s’impose !

25 ans de Audi RS4 « B5 »

› Hormis les généreuses sorties d’échappement et les grosses jantes de 18’’, la RS4 s’apparente presque à une simple A4 Avant. Un tour à bord vous convaincra du contraire !

L’avis d’Avus

Cette RS4 Mk1 continue de faire rêver, et pas seulement parce qu’elle est belle. D’abord parce qu’elle a été produite entre 2000 et 2002, à 6 030 exemplaires, ce qui reste peu, mais tout de même 2 fois plus que la RS2. Parmi lesquels 275 exemplaires ont trouvé à l’époque preneurs en France. Ensuite, en 1999 comme en 2024, cette RS4 délivre toujours son lot de sensations fortes, et mieux encore, elle offre une saveur « à l’ancienne », avec sa boite manuelle qui renforce le plaisir de conduite. Et il faut avouer que ce concept de break bipolaire, bien que moins rare de nos jours, reste toujours aussi singulier… et attractif !

25 ans de Audi RS4 « B5 »

« La transmission intégrale offre un grip remarquable de tous les instants, y compris sur sol mouillé »

On aime:
• Look sportif et de bon goût
• Conduite « à l’ancienne » savoureuse
• Performances encore remarquables
• Polyvalence au quotidien
• Encore abordable…

On aime moins:
• Rare en parfait état d’origine
• Comportement peu joueur
• Amortissement perfectible
• Cote qui monte !

Fiche technique Audi RS4 « B5 »:
Moteur : 6 cylindres en V biturbo de 2671 cm3, 24 soupapes
Puissance : 380 ch à 6100 tr/mn
Couple : 449 Nm à 2500 tr/mn
Transmission : quattro, bvm à 6 rapports
Dimensions (L x l x h) en m : 4m49 x 1m78 x 1m40
Pneus : 255/35 R 18
Poids : 1620 kg
0 à 100 km/h (sec) : 5,5
Vitesse maxi (km/h) : 250 (autolimitée)
Conso moyenne : 15 l/100 km

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