Audi Coupé quattro 136 ch, Voyage au bout de l’innovation

L’univers automobile a été marqué par des évolutions significatives, et Audi a toujours été au cœur de ces révolutions. Audi a su se réinventer au fil des décennies, notamment grâce à ses succès en rallye, ainsi qu’à une image de marque soigneusement cultivée. Nous avons repris les commandes d’un coupé quattro de seconde génération à la carrière discrète…

Texte et photos Jimmy Meloni

En bref
Lancement en 1988 de ce nouveau coupé quattro
Moteur 5 cyl. 2.3 E de 136 ch
Perf : 0 à 100 en 9,7 sec – 208 km/h
Cote 2024 : 18 000 € en parfait état

Dans les années 1980, Audi a frappé fort avec le lancement de l’Audi Coupé Ur quattro, qui a bouleversé le monde du rallye. Les passionnés le savent bien ! Les pilotes émérites tels que Hannu Mikkola, Michèle Mouton et Walter Röhrl ont remporté de nombreuses courses d’envergure, contribuant à faire briller les heures de gloire du Groupe B, une catégorie reine finalement interdite à cause de l’escalade de puissance. Ce modèle a non seulement dominé le Championnat du Monde des Rallyes, mais il a également établi un nouveau standard en matière de transmission intégrale dans le monde des voitures de tourisme. Avec son atypique moteur cinq cylindres turbo de 200 ch à la sonorité bien particulière, l’Audi quattro est devenue une véritable légende, capable de rivaliser avec des marques prestigieuses comme Porsche, Lancia, Ferrari, Renault et Ford notamment en course. Sous la houlette de Ferdinand Piëch, les succès sportifs d’Audi ont non seulement renforcé sa notoriété et crédibilité sur le marché, mais ont aussi permis à la jeune marque aux Anneaux d’acquérir une base de fans dévoués à travers le monde.

› Etroitement dérivé de l’Audi 90, ce coupé à la lourde tâche de succéder à la mythique Ur quattro, avec d’autres arguments…

Grâce à cette belle dynamique engagée, le constructeur se trouve en pleine croissance au milieu des années 90. Audi a enregistré une nette augmentation de ses volumes de vente, en grande partie grâce à la vision du bon docteur Piëch, qui a su administrer le bon traitement. Sa volonté inflexible de faire d’Audi une marque premium a conduit à une diversification de la gamme, allant des berlines aux breaks, en passant par les coupés et les cabriolets, tout en proposant des modèles sportifs de plus en plus efficaces et convaincants. L’image de marque d’Audi s’est également renforcée grâce à des innovations technologiques impressionnantes. En s’affirmant comme une entité autonome au sein du groupe Volkswagen (VAG), avec des initiatives telles que des halls séparés lors des salons automobiles ou en concession, Audi a su marquer son identité unique et son exclusivité. Bref, prendre son envol et indépendance…

Matière grise

Dans ce contexte d’évolution, j’ai eu le plaisir de conduire un modèle exceptionnel, l’Audi Coupé Quattro 2.3E, un véhicule encore un peu délaissé par les collectionneurs qui incarne pourtant à merveille l’esprit de la marque. C’est sur les hauteurs de l’arrière-pays grassois que j’ai repris les commandes de ce coupé discret, particulièrement attachant. Ce modèle, confié par Bernard P., un passionné reconnu dans le milieu des Audi (et membre de notre club partenaire le Roc Racing Historic), est un exemplaire rare, peu kilométré avec seulement 65 000 kilomètres, et resté dans un état d’origine remarquable. Représentant l’essence même du plaisir automobile, ce coupé du renouveau pour Audi après la domination du Ur quattro, évoque une époque où l’accent était mis sur l’expérience de conduite, plus que sur la performance brute.

Lancé en 1988, il a été conçu sur la base de l’avant-gardiste Audi 80 B3. Avec son design soigné tout en rondeurs et sa silhouette élégante, ce coupé bénéficiant de 4 belles places et d’un grand coffre incarne à merveille les belles valeurs du Grand Tourisme. Il se distingue par une face avant inspirée de la berline et une partie arrière très inclinée au style unique, coiffée par un aileron proéminent. Son design intemporel, marqué par des lignes sobres et épurées, lui permet de se mesurer à des concurrents de renom comme la BMW E30, déjà bien installée sur le marché grâce à ses nobles 6 cylindres en ligne. Les jantes spécifiques Speedline pourvues de pneus en 205/60/15, bien que modestes en taille, ajoutent une touche de sportivité à l’ensemble, tandis que l’intérieur, haut de gamme, témoigne déjà de l’exigence d’Audi en matière de qualité. Non seulement tout est parfaitement bien agencé, mais outre l’emploi de matériaux de qualité, les agencements sont sans faille. Preuve en est, en près de 40 ans d’existence, rien n’a bougé sur « mon » exemplaire !

› Le style tout en rondeurs, épuré et sobre, a de quoi séduire. Il préfigure ce que sera le « bio-design ».

Sous le capot, un moteur bien connu de nos services. Il s’agit bien sûr du cinq cylindres en position longitudinale de 2,3 litres, un bloc à l’architecture singulière qui offre pour le coup une mélodie envoûtante, bien que ses performances soient modestes par rapport aux normes contemporaines (1000 mètres départ-arrêté en 31,5 sec). Logique, car avec seulement 136 ch sous le capot pour déplacer près de 1200 kg, difficile de demander des miracles à cette mécanique privilégiant d’abord la douceur et les économies à la pompe, surtout que la transmission « tire long ». Une Alfa 75, une BMW série 3 ou une Mercedes 190 pour ne citer que celles-là, avaient déjà des motorisations plus véloces. Avec un 0 à 100 km/h couvert paresseusement en quasiment dix secondes (9,7 sec), ce coupé résolument bourgeois a choisi son camp. A la sportivité affirmée de son ancêtre l’Ur quattro, il privilégie clairement le confort et l’aisance sur longs trajets, se révélant être une véritable « avaleuse de kilomètres ». Ce coupé est un modèle de douceur et d’efficacité sur voie rapide.

› Avec ce modeste 5 cylindres 2.3 de seulement 136 ch, ce coupé vise plus les économies de carburant et la douceur de conduite que les performances pures.

Grand tourisme… à petit rythme

Toutefois, à l’usage en haussant le rythme, il devient évident que cette Audi Coupé quattro de seconde génération n’est pas faite pour se mesurer à des pointures sur les routes sinueuses. A l’époque, Audi a encore beaucoup à apprendre en matière de liaisons au sol par rapport aux références du marché. La suspension, un peu trop molle en détente et raide en compression, absorbe difficilement les déformations de la chaussée. La caisse « pompe », subit alors les irrégularités de la route (tout comme les occupants !), rendant une conduite rapide moins engageante. Les pneus, loin d’être sportifs, peinent par ailleurs à offrir le grip nécessaire pour apprécier pleinement ce modèle qui arbore pourtant fièrement le nom de quattro. Sur des sections plus techniques, le comportement pataud devient vite frustrant. La direction, manquant de retour, fait que l’on se sent parfois déconnecté de la route, et seules les sensations de freinage, puissantes et précises, viennent apporter un peu de réconfort dans cette expérience de conduite.

› L’intérieur de ce coupé taillé pour le Grand Tourisme offre une habitabilité généreuse pour 4 adultes et un coffre en rapport.

Une fois que l’on a compris que ce coupé n’a pas vocation à s’aligner au départ d’une spéciale de rallye comme le col du Turini, tout va bien. On réalise que l’Audi Coupé quattro 2.3E est avant tout une voiture de Grand Tourisme faite pour les longs trajets, où l’on peut réguler à grande vitesse sur l’autoroute, sans fatigue (208 km/h maxi). L’isolation phonique est remarquable, rivalisant avec celle d’une BMW Série 5 ou d’une Mercedes Classe E de l’époque, permettant de parcourir les grands axes sans fatigue. Ce modèle, bien qu’objectivement séduisant, était considéré comme « hors de prix » à l’époque, et était de surcroît sous-motorisé par rapport à ses concurrents. Pire, il existe chez Audi certaines traditions dont on se passerait bien, et ce, dès les années 80. En cette heureuse époque, les options sont en effet déjà chères et nombreuses malgré son positionnement haut de gamme, mis à l’index par notre fiscalité déjà décourageante (13 CV). C’est notamment le cas de l’indispensable climatisation qui ne faisait pas partie de la dotation de série, ce qui faisait de ce coupé peu connu un choix audacieux pour les amateurs de belles cylindrées. À côté de cette GT tranquille, l’élitiste et sportive version S2, apparue en fin d’année 1991 avec son fougueux moteur cinq cylindres de 220 ch emprunté à la vieillissante Audi Ur quattro 20 V, représente pour les plus exigeants l’équation parfaite… à condition d’accepter de payer le prix fort. Partageant le même châssis que ce paisible Coupé quattro de 136 chevaux, la S2 transcende le comportement routier avec des accélérations enfin crédibles, à la hauteur de son blason, offrant une expérience de conduite nettement supérieure.

› Parfait pour avaler sereinement des kilomètres d’autoroute, ce coupé manque en revanche de rigueur sur les routes sinueuses, son amortissement restant très perfectible.

L’avis d’Avus

L’Audi Coupé quattro 2.3E est bien plus qu’une simple voiture : c’est un symbole d’une époque où le plaisir de conduire était au centre des préoccupations. Grâce à des modèles comme celui-ci, Audi a su établir sa présence sur le marché des premiums, tout en cultivant une image de marque solide. En prenant le volant de ce coupé, j’ai ressenti une connexion profonde avec l’héritage de la marque aux anneaux, tout en étant transporté dans un monde où chaque virage est une célébration de l’ingénierie allemande. Pour les passionnés d’Audi, ce modèle représente une belle opportunité de revivre l’histoire tout en profitant d’une conduite sereine avec élégante. Ce coupé de Grand Tourisme est aussi un véritable hommage à l’opiniâtreté de Ferdinand Piëch et à sa vision d’Audi comme une marque premium, un héritage que chaque conducteur de ce modèle peut ressentir indiscutablement sur la route.

« L’Audi Coupé quattro 2.3E est avant tout une voiture de Grand Tourisme faite pour les longs trajets, où l’on peut réguler à grande vitesse sur l’autoroute, sans fatigue »

On aime:
• Esthétique agréable
• Qualité, fiabilité, finition exemplaire
• L’audio de série en « cinq cylindres » !
• Routière efficace

On aime moins:
• Prix à l’époque !
• Comportement pataud
• Sous motorisé
• Performances quelconques

Fiche technique Audi Coupé quattro 2,3E:
Moteur : 5 cylindres en ligne de 2309 cm3, 20v
Puissance : 136 ch à 5700 tr/mn
Couple : 190 Nm à 3500 tr/mn
Transmission : quattro, bvm à 5 rapports
Dimensions (L x l x h) en m : 4m36 x 1m71 x 1m36
Poids : 1170 kg
0 à 100 km/h (sec) : 9,7
Vitesse maxi (km/h) : 208
Conso moyenne : 8,5 l/100 km

Avus:
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