Audi Q6 e-tron quattro, Les doigts dans la prise
Ca y est, le voilà enfin : notre premier essai du nouveau Q6 e-tron ! Sous une apparence élégante et assez classique, ce SUV compact promet une vraie révolution en adoptant le top de la technologie en électrique. Bref, avec le Q6 e-tron, Audi met vraiment « les doigts dans la prise »…
Texte et photos Thomas Riaud
En bref
Nouveau modèle
SUV 100% électrique basé sur plateforme PPE
Batterie de 100 kWh, puissance de 306 ch, 387 ch et 489 ch
Autonomie maxi de 623 km (WLTP)
A cause – notamment – de problèmes de logiciel, Audi a cumulé les déboires et a tardé à lancer ces dernières années de vraies nouveautés. Mais ces soucis appartiennent désormais au passé, et c’est en grande forme que la marque aux Anneaux revient aux affaires (voir notre reportage au Mondial de Paris). Première salve avec cet inédit Q6 e-tron, un SUV 100% électrique cousin technique du nouveau Porsche Macan… Ainsi, après trois années de vaches maigres, la marque aux Anneaux nous promet un vaste plan-produit dans les mois à venir, avec les lancements successifs des nouvelles A5 berlines et breaks (déjà à l’essai dans ce numéro !), mais aussi du Q5 de 3ème génération ou encore d’une inédite berline électrique A6 e-tron, déclinée également en break. C’est précisément sur cette base technique – la plateforme PPE commune à Porsche – que repose ce tout nouveau Q6 e-tron, ici à l’essai.
› Grâce à la plateforme PPE intégrant les toutes dernières technologies en matière d’électrification, Audi propose enfin un SUV offrant un bon rayon d’action, et capable de se recharger rapidement. De quoi en faire une alternative aux classiques thermiques !
Avec 4m77 de long, ce SUV totalement inédit s’intercale judicieusement entre le compact Q4 e-tron lancé voilà 3 ans déjà, et le plus imposant Q8 e-tron, pionnier des Audi 100% électriques, tout juste upgradé l’an passé. Mais les avancées technologiques sont si rapides dans le domaine de la voiture électrique que l’ambitieux Q6 devrait sans peine faire oublier son grand frère, en héritant des dernières générations de batteries et de moteurs électriques. Il promet ainsi plus de puissance, mais aussi des consommations moindres et une autonomie en hausse sensible, au point de revendiquer jusqu’à 623 km en cycle mixte WLTP. Promesse tenue ?
Quand le courant passe
Déjà, avant de vous parler de nos impressions de conduite, attardons-nous un peu sur le design. Ce Q6 e-tron a le bon goût de ne pas ressembler à une voiture électrique en adoptant une robe musclée et équilibrée qui irait parfaitement à un modèle thermique. Il s’inscrit en tout cas parfaitement dans le style des dernières Audi, et se permet même une petite fantaisie au niveau des optiques, qui se voient placées sur 2 étages… mais de façon bien plus élégante que sur un Citroën C4 Picasso. Faut-il le préciser ? Il s’agit bien sûr de phares Matrix LED de dernière génération, pouvant offrir jusqu’à 8 signatures lumineuses, selon l’envie du propriétaire. Un dispositif qui vaut aussi pour les feux arrière à technologie OLED, ces derniers étant reliés par un fin bandeau, un effet de style cher à Marc Lichte, patron du design, qu’il a inauguré avec les dernières A8 et A7 Sportback… qui commencent à avoir quelques années déjà au compteur ! Enfin, comme sur toute Audi digne de ce nom, on aperçoit de subtils bossages surplombant les passages de roue, un gimmick suggérant une certaine sportivité nous venant tout droit de la mythique Ur quattro des années 80 ! Seul signe tangible qui indique que nous sommes bien en présence d’un véhicule électrique, la calandre singleframe est pleine.
Logique, car le plus intéressant ne se voit pas, puisque ce SUV renferme dans sa plateforme PPE – commune au nouveau Porsche Macan – ce qui se fait de mieux en électrification. Celle-ci abrite une grosse batterie de 100 kWh (dont 94,9 kWh utiles), permettant d’alimenter toutes les déclinaisons prévues. Cela comprend la sportive déclinaison SQ6 (489 ch), mais aussi le Q6 quattro de milieu de gamme ici à l’essai (387 ch), sans oublier un Q6 baptisé curieusement « Performance » qui se limite à un simple mode propulsion et se contente de 306 ch. Pour séduire un plus large public et proposer un prix d’attaque moins élevé, Audi nous promet, courant 2025, une version plus abordable (elle aussi en propulsion) nantie d’une batterie plus petite de 83 kWh. Par rapport au Q8 e-tron fabriqué à Forrest dans la banlieue de Bruxelles, les progrès sont plus que tangibles, avec une chaîne de traction 33% plus performante, tout en réduisant les consommations de 30% ! De quoi faire grimper l’autonomie jusqu’à 623 km (cycle mixte WLTP). Bien sûr, ces valeurs d’homologations sont comme d’habitude très optimistes, mais avec une autonomie réelle de 500 km environ, voilà qui placerait enfin ce Q6 en vraie alternative face à un modèle essence. Car grâce à son architecture 800 V, la recharge passe de 10 à 80% en seulement 21 minutes en se branchant sur une borne rapide, en grand nombre sur autoroute. Voilà qui change tout, et pour la première fois, il est probable qu’entre ce Q6 e-tron et nous, le courant passe enfin !
› Avec 387 ch en puissance cumulée, le Q6 e-tron quattro dispense un vrai plaisir de conduite, avec des accélérations saisissantes.
Ecran total
En prenant place à bord, les habitués de la marque devront apprendre à se familiariser avec ce cockpit entièrement inédit. Le mot « inédit » n’est en rien galvaudé tant on cherche au début ses repères. Le vrai renouveau d’Audi passe aussi par le traitement de son vaste intérieur, doté d’une planche de bord « 2.0 » qui séduira tous les geeks. Outre les compteurs paramétrables de type cockpit virtuel (11,9’’) et un large écran central tactile de 14,5’’ dédié à l’infodivertissement situé dans son prolongement, le Q6 peut recevoir en option un 3ème écran côté passager de 10,9’’ pour vous assister dans la navigation… ou regarder un film ! Le tout peut être complété, là encore en option, par un affichage tête haute à réalité augmentée. Bon, pour être franc, je ne suis absolument pas convaincu par cette débauche de technologie. Conduire avec une « télé » sur les genoux ne me fait pas frissonner, et je regrette que l’ensemble des commandes deviennent tactiles, les boutons physiques ayant presque tous disparu. Mais c’est, paraît-il, à la mode, et Audi ne fait finalement que suivre cette tendance forte, déjà en vogue chez Mercedes, BMW ou Tesla pour ne citer que ceux-là. En tant que « premium », il faut souligner l’excellente qualité de l’image à très haute résolution, sa fluidité aussi, sans oublier l’intégration d’applications très en vogue (audio ou vidéo), notamment Spotify, Youtube, sans oublier des jeux d’arcade, parfaits pour tuer l’attente lors des recharges. Bien sûr, tout le système est compatible avec Android Auto ou Apple Car Play.
› Style agréable, confort ouaté et technologies embarquées dernier-cri font de ce Q6 e-tron une auto très agréable à vivre… et à conduire.
Pour l’indécrottable « boomer petrolhead » que je suis (je sais, je cumule !), il me faut un certain temps pour apprivoiser toute cette technologie, mais je dois avouer que cela se fait assez intuitivement, surtout qu’il existe de judicieux raccourcis. Si cette présentation, épurée et très moderne, plaira à certains, un rapide mot sur la finition, de bonne facture… du moins sur les parties hautes, bien visibles. Car les parties basses du mobilier doivent composer avec des plastiques rigides, peu agréables au toucher. On sent bien qu’Audi a fait dans ce domaine des économies, quitte à prendre le risque d’égratigner sa réputation d’excellence en matière de finition, son grand point fort. De même, les nombreuses appliques de type « black piano » ne vont pas rester jolies bien longtemps, ces dernières étant sensibles aux rayures… et aux traces de doigts. Un bon point en revanche pour l’habitabilité offerte tant aux places avant qu’arrière. Dans ce dernier cas, l’architecture électrique permettant de se passer d’un encombrant tunnel de transmission représente un vrai « plus » pour la place arrière centrale, et il faut souligner la présence de nombreux espaces de rangement à bord, des contre-portes à l’accoudoir central. Quant au coffre, il offre une capacité honnête de 526 litres, le tout se voyant complété par la présence d’un coffre avant de 64 litres (baptisé « frunk »), dédié au rangement des câbles de recharge. Bien vu, car ces derniers, encombrants et vite sales, ne viendront pas se mêler aux bagages dans le coffre. Autre bon point, l’habitabilité, généreuse tant aux places avant qu’arrière, tant au niveau de l’espace aux jambes qu’en largeur aux coudes. En revanche, même s’il n’y a pas de gros tunnel de transmission (électrique oblige), le plancher n’est curieusement pas parfaitement plat à l’arrière, et comme dans une thermique, la place centrale apparaît comme assez raide et étriquée. Et quitte à mettre des écrans partout, il aurait été plus judicieux d’en intégrer dans les appuie-têtes, à l’attention des passagers arrière.
Tout pour plaire… sauf le prix !
Clef dans la poche, l’habitacle se déverrouille tout seul dès que l’on attrape la poignée de porte, et une fois que l’on met le contact, il ne se passe… rien ! Un souci par nature inexistant sur une bonne vieille voiture thermique. Ici, pour savoir que la voiture est prête à partir, faute de bruit artificiel généré à bord, il faut regarder les compteurs s’animer. Sélecteur calé sur « drive », il ne reste plus qu’à m’élancer, chose que le Q6 e-tron fait, là encore, dans la plus grande discrétion. Sur route, malgré la monte d’énormes roues de 21 pouces, ce SUV se distingue d’emblée par son confort remarquable, tant au niveau des suspensions (pneumatiques), que de l’acoustique, le double-vitrage n’étant pas étranger à cette performance. Accélérations vives sur les 4 roues (un moteur par essieu), silence de roulement et consommation mesurée (20,5 kWh en moyenne), permettent de rouler sereinement dans un confort ouaté, digne d’une auto de la catégorie supérieure.
Et en forçant l’allure, rien ne semble venir perturber la quiétude des passagers, pas même les bruits d’air, très peu présents, signe d’une aérodynamique soignée. Et il suffit d’écraser l’accélérateur pour se retrouver presque « collé » au fond des sièges, avec moins de 6 sec pour passer de 0 à 100 km/h. En revanche, le poids conséquent de ce SUV proche des 2,4 tonnes à vide se fait sentir dans les virages abordés un peu vite. Il prend alors du roulis et malgré une direction précise et progressive qui se durcit dans les virages, l’avant a tendance à « élargir » la trajectoire. Pour adopter une conduite plus dynamique, il faudra sans doute se tourner vers le SQ6, probablement réglé de façon plus sportive au niveau de l’amortissement. On prend du plaisir autrement, en jouant avec les palettes pour récupérer de l’énergie, voire en forçant cette régénération en basculant en mode « B » (brake), autorisant alors une conduite de type « one-pedal », permettant de ne presque jamais toucher aux freins. Tout est d’ailleurs bon pour préserver les batteries, y compris le GPS qui, lorsqu’il est programmé, module en mode auto le frein moteur en fonction des limitations et du trafic alentour. Il en va de même pour la transmission intégrale quattro, non permanente, qui désaccouple le train avant dès que possible (ligne droite, freinage…), et ce, de façon très pertinente. Pertinent est d’ailleurs l’adjectif qui me vient à l’esprit pour qualifier ce SUV électrique qui offre enfin une alternative crédible au thermique, car mis bout-à-bout, tous ces efforts payent. Oui, mais…
› Le plus gros défaut de ce Q6 est son prix, stratosphérique pour un SUV compact. L’absence de malus aide à relativiser, et Audi préfère communiquer sur des loyers pour faire passer la pilule !
L’avis d’Avus
En effet, en offrant une autonomie réelle proche des 500 km sans faire de l’éco-conduite, ce Q6 e-tron dispose d’un rayon d’action très convaincant, semblable à un modèle carburant au sans-plomb. Et « le plein » se fait presque aussi promptement, en à peine 20 minutes pour récupérer 80% de charge… à condition de fréquenter une borne de recharge rapide. Si elles sont nombreuses sur nos autoroutes, elles se font hélas encore trop rares ailleurs… et inexistantes dans les campagnes reculées. Ainsi, sur une classique borne AC 11 kW, comptez… 10h25 pour une recharge complète en partant de zéro. Mais le plus grand écueil reste le tarif, fixé à des altitudes décourageantes, puisque ce Q6 e-tron quattro démarre à 83 450 € en finition « design », la version Performance de 306 ch (proposée qu’en 4×2) étant à peine moins chère (77 400 €). Quant au sportif SQ6, il débute carrément à 99 870 €, ces prix ne comprenant bien sûr aucune option ou « pack », pourtant nombreux chez Audi. En comparaison, le nouveau Q5 commence à 57 550 € avec le 2.0 TFSI de 204 ch en finition design… auxquels il faudra ajouter minimum 26 302 € de malus selon le barème 2024. Cela permet de relativiser les prix très élevés de ce Q6 e-tron qui échappe à tout malus – des tarifs au passage assez proches d’ailleurs du nouveau Porsche Macan – et de se rendre accessoirement compte que des voitures « normales » deviennent, en France, anormalement des produits de luxe, en raison d’une fiscalité devenue folle.
« Pertinent est l’adjectif qui me vient à l’esprit pour qualifier ce SUV électrique qui offre enfin une alternative crédible au thermique »
On aime:
• Style agréable
• Confort remarquable
• Technologie au top
• Autonomie et recharges intéressantes
On aime moins:
• Prix trop élevés… proches du Macan
• Poids important
• Trop d’options dans des « packs »
• Détails de finition
Fiche technique Audi Q6 e-tron quattro:
Moteur : 1 moteur électrique
synchrone/asynchrone par essieu
Batterie : 100 kWh
Puissance : 387 ch en cumulé
Couple : 580 Nm (train arrière) + 275 Nm (train avant)
Transmission : quattro non permanent
Dimensions (L x l x h) en m : 4m77 x 1m94 x 1m69
Poids : 2400 kg
0 à 100 km/h (sec) : 5,9
Vitesse maxi (km/h) : 210
Conso moyenne (WLTP) : 17 à 19,4 kwh/100 km
Rejets de CO2 : 0 g/km