Passionné de compétition automobile – et plus particulièrement de rallye – Christophe Vaison s’est attaqué au Graal en la matière : les mythiques Groupes B ! Découverte d’un atelier pas comme les autres, où ces monstres sacrés reprennent vie…
Texte et photos Thomas Riaud
Si, sur circuit fermé, la discipline reine reste bien la F1, en rallye, cette élite fut incarnée au milieu des années 80 par les Groupes B. Une catégorie bien à part qui comptait, grâce à un règlement très permissif, de véritables sport-prototypes engagés par les plus grands constructeurs. Mais cette surenchère mécanique a conduit à des drames. La succession d’accidents mortels impliquant ces monstres mécaniques a entraîné leur interdiction pure et simple, la FIA sifflant la fin de la partie en 1987. Depuis, ces autos légendaires adulées par beaucoup ont rejoint les musées… ou bien viennent, depuis quelques années, à nouveau en découdre pour la plus grande joie des spectateurs lors d’épreuves dédiées aux Véhicules Historiques de Compétition (VHC), du moins celles qui n’ont pas 4 roues motrices ni de turbo, toujours interdits par le règlement. Une discipline particulièrement prisée des amateurs de belles mécaniques, dont Christophe Vaison, pilote professionnel depuis son adolescence, avec un faible avoué pour le rallye. Mais avant de devenir une référence en matière de reconstruction de ces bolides historiques mythiques, son parcours a été long… et inattendu ! « J’ai commencé comme beaucoup par le karting à 14 ans puis, une fois le permis en poche, j’ai fait pas mal de courses de côte sur une Alpine A110. A l’époque, seul courir m’intéressait ».
Véritable touche-à-tout avec un égal talent, Christophe Vaison glanera de multiples victoires en rallye-cross à partir de 1987 sur une Peugeot 205, puis disputera 7 années de suite le Trophée Andros et même une quinzaine de fois les 24 H de Chamonix ! « J’étais un véritable boulimique de compétitions, au point de participer jusqu’à 27 courses dans l’année. J’ai eu la chance d’être au bon moment au bon endroit, car c’est à Chamonix que j’ai rencontré en 1995 le célèbre cascadeur Rémy Julienne. Il avait repéré mon « coup de volant », et 15 jours plus tard, il me proposait de participer en tant que pilote aux cascades automobiles d’un James Bond (NDLR : « Golden Eye ». Ça s’est très bien passé et j’ai ensuite enchaîné sur d’autres grosses productions comme « Taxi », « Transporteur » ou « Michel Vaillant ». Mais en tant qu’homme avisé, Christophe a su que sa carrière de pilote professionnel ne durerait pas. Il a donc négocié avec brio sa reconversion, en montant en 1999 une structure spécialisée dans la construction et préparation de… voitures de course. On ne se refait pas ! Mais là encore, le chemin qui mène à la reconstruction de Groupe B a été long et improbable !
› Christophe Vaison est un génial « touche-à-tout » de talent, autant pilote professionnel que cascadeur, mais aussi constructeur et préparateur de Groupes B.
« Rémy Julienne a été une fois de plus d’une aide précieuse, car il m’a confié la réalisation et mise au point de 26 voitures très spéciales pour assurer un nouveau show mécanique de Disneyland imaginé et réglé par ses soins. Un beau contrat, car cela a finalement débouché sur une collaboration de 22 ans durant lesquels j’ai construit une centaine de voitures ! C’est à ce moment que ma structure « Vaison Sport » a pris de l’importance, jusqu’à employer 30 personnes rien que sur ce projet ! Et en parallèle, ces expériences m’ont permis de concevoir avec mes ingénieurs et de réaliser des sport-protos pour certains grands constructeurs (comme les Toyota T2 du Dakar) et même des projets de véhicules rapides d’intervention pour l’armée de terre ».
Mais le démon de la compétition va vite rattraper Christophe Vaison. « Pour moi, les Groupe B représentent un aboutissement, un âge d’or du rallye, la magie de l’histoire. Et l’essor des courses historiques m’a poussé, d’abord à titre personnel, à chercher une voiture pour courir. J’ai donc acheté en 2013, complètement démontée, une Lancia 037, puis une Peugeot 205 Turbo 16 Evo1 avec un gros lot de pièces détachées. C’est là que j’ai véritablement commencé à bien connaître ces autos, à force de travailler dessus. Et à les apprécier en les pilotant, car si je ne peux pas m’en servir, cela ne m’intéresse pas ! ».
› Plongée dans la « tanière des monstres » et rencontre avec une S1 quattro, aux côtés d’une bestiale Lancia 037…
Forcément, Christophe a ses préférées, mais difficile de faire un choix entre ses enfants ! « La plus agile est la 037, une stricte propulsion avec laquelle j’ai remporté 2 fois le Tour de Corse historique. Mais j’ai peut-être une préférence pour la 205 T16, qui est parfaitement équilibrée, très puissante et plus efficace. La plus simple techniquement est finalement l’Audi S1 quattro, qui se démarque d’abord par son fabuleux 5 cylindres turbo, à la sonorité unique ! J’ai réalisé 2 répliques de cette dernière avec mes 37 collaborateurs au sein de ma société « Vaison Technologies ». Mais pour les 037 et 205 T16, il s’agit plutôt de reconstruction à l’identique, avec des pièces d’origine, bien sûr toutes spécifiques. J’ai déjà refait cinq T16 et une est en cours d’assemblage, et lorsque mon stock sera épuisé, j’arrêterai d’en construire pour mes clients. Il faut compter au minimum 3000 heures de travail pour une 037, et bien plus encore pour la 205 T16 tant elle est complexe. Je soude à l’intérieur un arceau de plus gros diamètre afin d’éviter toute confusion avec les modèles d’époque.
Evidemment, ces voitures refaites à l’identique sont éligibles dans de nombreuses épreuves historiques et j’y participe dès que je peux. Ces engins sont dingues à piloter ! Il faut être très fin, sinon gare ! ». Mais comme un joueur d’échecs, Christophe Vaison a toujours un coup d’avance. « J’ai reconstruit 8 châssis en tout, mais je pense déjà à demain, tout en restant dans ce que j’aime : la course automobile ! Je commence à restaurer des F1 historiques, mais aussi d’anciennes Groupes 4 et Groupes A ». Voilà sans doute ce que l’on peut appeler le « plan B » du bouillonnant Christophe Vaison…
Entrez dans la légende !
Si l’envie bien légitime de vivre un grand moment de sensations fortes vous prend en montant à bord d’une Groupe B, sachez que cela est possible ! Christophe Vaison réalise, sur inscription ( il y a de la demande ! ), des baptêmes à bord de la redoutable Audi S1 quattro sur le circuit très technique de 2 km attenant à ses ateliers (Vaison piste). Un plaisir intense et unique facturé 300 € pour 3 tours, et 1500 € pour 10 tours…