Audi TT Mk1, Attention, chef d’œuvre !
Parfois, il arrive qu’un constructeur sorte une voiture au design génial qui va devenir iconique. Chez Audi, il existe au moins un modèle répondant à cette définition : le TT !
Par Jack Seller, photos Thomas Riaud
En bref
Premier modèle de TT
Version roadster 1.8 180 ch
Cote 2023 : 7000 € en parfait état
Tout constructeur rêve de sortir un jour une voiture iconique, qui fera date dans l’histoire. On les comprend bien volontiers, tant elles sont bonnes pour l’image et génératrices de ventes. Mais la recette n’est pas gravée dans le marbre, et par définition elles se font rares, au point de se compter sur les doigts des 2 mains. Parmi les voitures indémodables sans cesse remises au goût du jour on peut citer la Mini, la Coccinelle, la Fiat 500, le Land Rover Defender, le Range Rover, la Jeep Wrangler, la Porsche 911 et… l’Audi TT ! Tout est génial dans cette petite voiture « plaisir », à commencer par le nom, qui fait ouvertement référence à la course de moto du Tourist Trophy, disputée jadis par NSU, une des marques satellites du groupe Auto Union. Et ce nom, « TT », évoque, par là même, une parfaite symétrie, que l’on retrouve justement dans le design de la voiture, vraiment unique. Ce style lissé, très fort, allant juste à l’essentiel en accentuant les lignes de force, est inspiré de l’école d’architecture du Bauhaus.
Mais il serait juste de dire aussi qu’il trouve sa source dans le concept Renault Argos dévoilé en 1994 (signé Jean-Pierre Ploué, sous la houlette de Patrick le Quément), un roadster minimaliste, épuré à l’extrême, qui comme trop souvent chez Renault passera aux oubliettes. Mais l’idée est là, et il marquera les esprits des designers Audi (notamment l’américain Thomas Freeman à qui l’on doit en partie cette voiture), qui sauront apporter leur touche pour faire naître leur TT au style très personnel. Dans une catégorie où l’agressivité est de mise, avec des formes généralement saillantes, le compact TT (4m04) prend l’exact contre-pied et ose au contraire un style tout en rondeurs. Avec quelques détails remarquables, comme les « paupières » lovées dans les phares affleurants, ou encore la trappe à carburant en aluminium inspirée de voitures de course et, sur le roadster, les arceaux de sécurité. Outre le nom et le style, vraiment géniaux, le TT c’est aussi pour Audi un « produit » hyper rentable, dans la mesure où il partage de très nombreux éléments techniques avec la Golf 3 de l’époque, seule condition requise pour rendre viable un tel projet. En clair, tout ce qui ne se voit pas comme la plateforme, les moteurs ou les boites de vitesses sont d’origine Volkswagen, et seul « l’emballage » est signé Audi !
Terriblement Tentant
Lorsque le TT est sorti en France un certain 5 novembre 1998, il a démodé tout ce qui roulait et s’est hissé, d’un coup, en « voiture tendance ». C’était déjà le cas en coupé, terriblement tentant avec son arche en guise de toit qui coiffe la caisse et fait écho à celles surlignant les passages de roue (et aux Auto Union d’avant-guerre). Ca l’est peut-être encore davantage en version roadster. Si celle-ci perd les deux petites places d’appoint dans la bataille (et le très pratique coffre avec hayon !), elle a néanmoins de quoi convaincre les claustrophobes, qui ont tendance à « étouffer » à bord du coupé, doté de meurtrières en guise de vitres. Du moins le roadster prend sa revanche lorsqu’il fait beau et que l’on peut décapoter ! Dans tous les cas, après l’effet « whaouhhh » déclenché par la vision de la carrosserie – un véritable chef d’œuvre qui fera date, à coup sûr, – eh bien, on se surprend à vivre un second… effet « whaouhhh », lorsque l’on prend place à bord.
Audi a su parfaitement faire oublier les dessous roturiers de la Golf, tant cet habitacle distille, lui aussi, une saveur si particulière. A vrai dire, depuis ce premier TT, on n’a jamais vu un habitacle aussi travaillé dans le moindre détail, chez la concurrence… ni chez Audi d’ailleurs ! Chaque élément est un petit chef d’œuvre du design industriel à lui tout seul, qu’il s’agisse des aiguilles des compteurs stylisées, des poignées de porte, du soufflet de la boîte de vitesses, sans compter ces nombreux éléments en aluminium véritable tel le cache de l’autoradio ou le cerclage des aérateurs, un élément qui perdure d’ailleurs sur l’actuel TT. Pour rationaliser les coûts, le TT « 8N » (pour les intimes) s’en remet à des 4 cylindres, notamment un brillant 1.8 à 20 soupapes décliné à plusieurs sauces, avec une puissance variant de 150 à 220 ch, ce dernier étant réservé, au début, à la version de pointe, avec un quattro Haldex, comme sur la première S3. Entre ces extrêmes se trouve peut-être le juste milieu, une version délivrant 180 ch, épaulée par un turbo. C’est précisément ce bloc qui anime notre modèle d’essai, en carrosserie roadster…
Le ramage, pas le plumage
Passé l’émerveillement en contemplant cet habitacle mêlant design fort et qualité, il est grand temps de mettre en mouvement cette sculpture sur roues. Bon, décapoté ou pas, difficile de s’extasier sur la sonorité de ce moteur, pas du tout désagréable, mais pas vraiment prenante non plus. La position de conduite n’est pas mauvaise – le volant se réglant en hauteur et en profondeur, chose rare à l’époque – mais à moins de vouloir se déboîter une épaule, on oubliera vite l’idée de vouloir rouler coude à la portière tant la ceinture de caisse est haute ! Cela incite à mieux conduire, en ayant par exemple les deux mains à 10h10 sur le volant, et à la lâcher furtivement de la main droite, le temps d’engager une vitesse. Si la version quattro comporte 6 rapports, la nôtre, plus modeste, doit se contenter de 5 vitesses. C’est moins bien, mais fort heureusement, les débattements sont courts et le guidage sans faille, rendant la conduite plus agréable. Quant au moteur, il fait son office sans faiblir, avec une évidente bonne volonté (0 à 100 km/h en 7,7 sec), mais pour avoir du sport, du vrai, il faudra voir ailleurs ! Même pas du côté du pourtant plus volontaire quattro de 220 ch, mais plutôt en regardant vers le rare V6 3.2 de 250 ch arrivé sur le tard qui donne une vraie noblesse au TT.
Sur ce point, le TT n’est pas du tout au niveau de ce que proposait Porsche pour son Boxster par exemple (ou même Nissan avec la 350 Z), ce qui valut le sobriquet un rien méchant de « voiture de garçon-coiffeur » à notre Audi. Un écueil qu’elle aura à cœur de corriger sur les générations suivantes à travers ses déclinaisons S et RS ! Pour apprécier pleinement ce TT de première génération à sa juste valeur, il suffit de se contenter de rouler à bon rythme, chose qu’il fait bien volontiers en toute sécurité, sans vouloir forcer son talent. En haussant l’allure, on trouvera que la direction manque un peu de consistance, et l’amortissement, mal calibré, se fait vite « cassant » et inconfortable sur les mauvais raccords de chaussée. Des défauts déjà perceptibles en leur temps, qui ne se sont bien sûr pas arrangés avec les années qui passent. C’est précisément sur ce point que ce premier TT fait le plus son âge, tant Audi (et Volkswagen !), a su progresser dans le domaine des liaisons au sol. Mais à bord d’un roadster devenu « vintage », fait pour rouler paisiblement plus près des étoiles, est-ce véritablement un défaut ?
L’avis d’Avus
Grâce à l’inclassable TT, Audi a changé durablement son image, au point de devenir une marque « design », où l’émotion stylistique a autant sa place que l’innovation technologique. C’est ce formidable héritage que le premier TT a légué à Audi, au point d’inspirer des modèles tout aussi passionnants, comme l’A5, l’A7, la R8 ou même la récente e-tron GT. Et de tous ces modèles, nul doute que le premier TT restera un jalon dans l’Histoire de l’Automobile, bien au-delà du patrimoine d’Audi, au point de pouvoir être montré dans toutes les écoles de design comme le parfait exemple à suivre ! Dommage en revanche que la partie « mécanique » – sans être désagréable pour autant – ne soit pas au niveau du style. Il n’empêche, en coupé comme en roadster ce TT Mk1 est vraiment digne d’intérêt, et il ne fait aucun doute qu’il devienne dans les années à venir un collector très tendance…
On aime
Style unique !
Traitement intérieur
Qualité de fabrication
Cote encore attractive
On aime moins
Amortissement
Plus GT que sportive
Vision de ¾ arrière
Aspects pratiques limités sur roadster
Devient rare en parfait état
Audi TT Mk1 roaster 1.8 turbo
Moteur : 4 cylindres en ligne, 1781 cm3, un turbo
Alimentation : injection gestion intégrale Bosch Motronic
Puissance maxi (ch à tr/mn) : 180 à 5500
Transmission : roues avant, boîte mécanique 5 rapports
Suspension AV : McPherson
Suspension AR : bras tirés
Freins : Disques avant et arrière
Dimensions L x l x h (m) : 4,04 x 1,76 x 1,36
Poids (kg) : 1305
Pneus : 205/55 ZR 16
Vitesse maxi (km/h) : 226
0 à 100 km/h (sec) : 7,7
Cote en 2023 : 14 000 euros en parfait état