A8L TFSIe, Le pullman à classe Eco… logique !
Chez Audi, le vaisseau amiral A8 fait figure de rareté, désormais occulté par les presque aussi luxueux SUV Q7 et Q8. Le pullman Audi s’offre donc une sérieuse remise à niveau, comprenant l’introduction d’une version hybride rechargeable qui s’adjugera l’essentiel des ventes…
Par Thomas Riaud, photos Thomas Riaud
En bref
Quatrième génération d’A8, restylage
Version « L » limousine allongée de 13 cm
Version hybride rechargeable (462 ch en cumulé, moteur V6 3.0 de 340 ch)
Performances : 0 à 100 km/h en 4,9 sec – 250 km/h
Prix (à partir de) : 123 100 € (en finition A8, 141 300 € en Avus Extended)
Dehors, la pluie tombe fort sans discontinuer, sous un ciel de plomb. Sur la route détrempée, le marquage au sol semble être inexistant, effacé sous des torrents d’eau. Pour ne rien arranger, des bourrasques de vent viennent, elles aussi, ajouter des difficultés à ces conditions de circulation que l’on pourrait qualifier d’exécrables. Pourtant, dans mon cocon nimbé de cuir des sièges à la planche de bord, je suis bien. Très bien même. Mon vaisseau équipé naturellement de la transmission intégrale quattro trace sa route en toute quiétude en direction de la Franche-Comté, imperturbable face à la colère des éléments. L’insonorisation, assurée par un double vitrage, est juste parfaite, et la suspension pneumatique, gommant la majorité des aspérités de la route (malgré des roues de 20 pouces !), donne l’illusion de rouler sur du velours. Dehors, c’est l’enfer mais dedans, clim quadrizone réglée sur 22°, je me suis rarement senti aussi serein, décontracté. Et encore, je ne suis assis qu’à la place du conducteur. Une place enviable dans toute voiture, sauf peut-être celle-ci !
Même si je profite d’un siège électrique à 22 positions au moelleux incomparable bénéficiant d’une appréciable fonction chauffante (tout comme le volant), je n’ai pas droit aux massages prodigués aux passagers des 2 places arrière, cette version « L » limousine, à l’empattement allongé de 13 cm, se limitant volontairement à seulement 4 places. Quatre places façon « classe affaire », digne d’un pullman, rendant les longs parcours moins longs et moins fatigants. Un tour de magie opéré avec toujours plus de brio depuis près de 30 ans, depuis qu’Audi a lancé sa première A8. Aujourd’hui, nous en sommes déjà à la 4ème génération, chacune ayant été en son temps la vitrine technologique du constructeur, en apportant son lot d’innovations. Ceci est encore plus vrai à travers cette mouture fraîchement restylée (calandre chromée, boucliers…), qui se pose, ni plus ni moins, comme ce qui se fait de mieux en automobile avec les Mercedes Classe S et BMW Série 7, ses rares rivales directes. Mais la très high-tech A8 conserve pour elle quelques avantages technologiques sur la concurrence, au point d’en faire sa marque de fabrique, à commencer par sa transmission quattro ou sa structure tout en aluminium, gage de légèreté et de rigidité…
Logique fiscale
Certes, l’A8 est bien un modèle de série, mais avec seulement 75 exemplaires écoulés l’an passé sur notre territoire, elle mérite sa place dans ce numéro spécial dédié aux modèles « hors-série ». Et c’est davantage le cas à travers cette élitiste variante « L », encore plus confidentielle, vendue à moins de… 10 exemplaires. Malgré sa débauche de technologies, l’A8 peine à rencontrer le succès, la grosse berline « à papa », sans doute trop classique sur la forme, souffrant comme toutes les autres « tricorps » du succès des SUV, d’apparence plus « cools » et « branchés ». A propos de « branché », la folie de notre fiscalité étant toujours plus dissuasive envers les versions thermiques classiques, nous n’aurons plus droit en France aux traditionnelles motorisations essence (excepté pour la sportive S8), pourtant si probantes à l’usage. Pragmatique, Audi préfère miser sur cette version hybride rechargeable dispensée de malus (et de TVS pour les professionnels), l’excellente version 50 TDI (affichée dès 99 000 €) étant désormais bêtement punie par un gros malus (de 8 671 à 15 506 € selon équipement), auquel il faut ajouter 3700 € de malus au poids. Voilà qui rééquilibre le débat face à cette hybride rechargeable, malgré le surcoût qu’elle réclame à l’achat. A moins d’être un très gros rouleur, ce basculement vers l’hybride se fait à raison, et pas seulement d’un point de vue purement fiscal. Car malgré mes réticences à rouler dans une « auto à pile », que l’on doit de surcroît rebrancher régulièrement pour pouvoir bénéficier de ses vertus « propres », force est de constater, après un périple varié d’une semaine à son bord, de près de 1300 km, que cette A8 a tout pour convaincre. Y compris en roulant « comme un cochon », sans jamais se soucier d’écoconduite !
Comme la plupart des utilisateurs d’hybrides rechargeables qui achètent ce type de modèle pour échapper aux malus assassins, je n’ai effectué aucune recharge. J’ai donc sollicité pleinement le bloc essence, un noble V6 3.0 TFSI de 340 ch, bien plus agréable à l’oreille que les traditionnels 4 cylindres que l’on trouve habituellement sur les hybrides rechargeables. Mais pour bien faire mon job, je suis tout de même parti de Paris avec la batterie chargée à bloc, histoire de voir ce que cela donnait. Avec sa grosse batterie lithium-ion de 14,4 kWh logée sous le plancher du coffre, notre A8 permet de parcourir, en théorie, entre 54 et 60 km dans la limite de 135 km/h. Le tout, bien sûr, sans consommer une goutte de carburant, le tout dans un silence absolu. Dans la vraie vie, elle tient presque toutes ses promesses, puisqu’en alternant ville, autoroute et route, je suis parvenu à couvrir presque 50 km, ce qui laisse augurer de vraies économies au quotidien si vous l’utilisez pour de courts trajets… et que vous la rebranchez à chaque fois ! Et en mode électrique, le silence de l’A8, déjà remarquable en thermique, devient ici exemplaire, ne laissant filtrer que de rares bruits de roulement. Mais pour effectuer ce super-test, décision est prise de filer vers la Franche-Comté, un long parcours qui va naturellement vider la batterie, laissant le bloc thermique reprendre ses droits…
L’hybride première classe
Ce qui est bien avec cette version à pile, c’est qu’elle travaille intelligemment, en conservant toujours un minimum de « jus » dans la batterie. Et elle se débrouille pour récupérer de l’énergie à la moindre occasion, dès que l’on freine où que l’on lève le pied. Cela lui permet d’épauler le bloc thermique lors des relances, pour le moins vigoureuses, l’auto développant quelques 700 Nm dès 1370 tr/mn, autant dire presque dès le démarrage ! Après, l’excellente boite Tiptronic à 8 rapports assure le job, en passant les rapports à la volée (et en douceur), ce qui permet à ce mastodonte de 2465 kg, d’effacer le 0 à 100 km/h en seulement 4,9 secondes ! Des valeurs dignes d’une bonne sportive, même si cette A8 ne donne jamais l’impression de rouler vite, tant elle se montre sûre, confortable et silencieuse, vous coupant du monde extérieur. Mieux vaut avoir un œil sur le compteur (ou l’affichage tête haute), car on a tôt fait de croiser « à deux de tension » à près de 200 km/h, signe de l’incroyable efficacité de cette dévoreuse d’autoroute.
Forcément, revenir à des allures plus conventionnelles réclame un certain effort, tant on a l’impression d’être « arrêté ». Mais cette imposante limousine n’est pas seulement impériale sur voie rapide. Elle sait aussi parfaitement tenir son rang sur le réseau secondaire, sa suspension pneumatique faisant là encore des miracles, en gommant les nombreux trous et déformations, tout en limitant les prises de roulis. Et cette A8 dispose d’une arme secrète, redoutable d’efficacité pour négocier avec agilité et grâce les virages : un essieu arrière directionnel ! Il apporte indéniablement du dynamisme en conduite rapide dans le sinueux, permettant à ce mastodonte de faire oublier son gabarit XXL. Et cet équipement est également d’une grande aide pour manœuvrer dans les rues étroites et les parkings, une armada de caméras et de détecteurs venant en plus à la rescousse. Après avoir parcouru près de 1300 km à son bord, vient l’heure du bilan. Il est bien sûr extrêmement positif, et le contraire aurait été dommage pour une auto de cette catégorie, facturée plus de 100 000 € !
L’avis d’Avus
Outre un confort, une dotation pléthorique et un confort souverain, la plus belle surprise à l’issue de ce super-test aura été la consommation moyenne enregistrée. Celle-ci est de l’ordre de 10 l/100 km, en roulant encore une fois batterie vide, et le plus souvent à bonne allure, ce qui reste pour le moins raisonnable pour un engin de ce calibre. Nul doute qu’en jouant le jeu de la recharge quotidienne, cette A8L ne réclamerait pas plus qu’une frugale citadine, justifiant ainsi pleinement son exception de malus. Mais cette super Audi a aussi quelques défauts… En plus d’un style lourd et clinquant, discutable, les critiques plus objectives se limitent à la capacité du coffre, limitée à seulement 390 litres, ce dernier étant amputé de 115 litres par rapport à une version TDI, à cause de l’emport des batteries. Pour une auto de ce gabarit, c’est bien peu. Autre grief, la reconnaissance vocale qui n’est pas du tout au niveau de ce qui se fait de mieux en la matière, à découvrir… chez Mercedes !
On aime
Finition parfaite
Agrément de conduite
Consommation moyenne favorable
Dotation pléthorique
Pas de malus, ni TVS !
On aime moins
Style lourd
Encombrement en ville
Capacité du coffre réduite
Assistant vocal peu performant
Options chères et nombreuses
Caractéristiques techniques : Audi A8L 60 TFSIe
Moteur : 6 cylindres en V, 2995 cm3, turbo + moteur électrique
Puissance (ch à tr/mn) : 340 et 500 Nm + 142 ch et 350 Nm (462 ch en cumulé à 3500 tr/mn)
Couple (Nm à tr/mn) : 700 Nm en cumulé
Transmission : intégrale, quattro
Boîte : BVA Tiptronic à 8 rapports
Freins : 4 disques ventilés
Pneumatiques : 255/45 R 19
L x l x h (m) : 5,32 x 1,94 x 1,47
Coffre (mini/maxi, litres) : 390
Réservoir (litres) : 65
Poids à vide (kg) : 2465
Conso mixte (l/100 km) : 2,6
Rejet de CO2 (g/km) : 58
0 à 100 km/h (sec) : 4,2
Vitesse maxi (km/h) : 250