On vous l’avait annoncé dans notre dernier numéro : Bauer Paris ouvre une antenne Audi Tradition, réservée aux modèles vintage ! Et cela n’a rien d’une posture, la passion pour les anciennes étant également partagée par de nombreux employés. La preuve par l’image…
Texte et photos Thomas Riaud
Cela fait belle lurette que tous les grands constructeurs ont compris que leur patrimoine valait de l’or. Tous ? Presque, à l’exception notoire d’Audi, largement en retrait par rapport à la plupart des marques premium, à commencer par ses compatriotes. Cela vaut pour Audi AG qui, au-delà de la participation à quelques manifestations incontournables avec des modèles historiques (via Audi Tradition), ne fait pas grand-chose pour pousser le réseau européen à promouvoir et restaurer les modèles anciens. Et cela vaut davantage encore pour Audi France, lanterne rouge en la matière qui se fiche de son patrimoine comme de l’An 40. De la direction aux cadors du marketing, on ne pense qu’à une seule chose : tenir ses petits objectifs de vente et fourguer un maximum d’engins à piles. Triste réalité…
Heureusement, dans le réseau hexagonal, il existe encore d’authentiques passionnés, qui sont entrés chez Audi quand la quattro faisait trembler le monde du rallye. Une autre époque… C’est le cas de Thierry Tanfin, directeur de Bauer Paris, une entité bien connue des fidèles de la marque qui rayonne sur la capitale et ses environs depuis 1968. A l’époque, Bauer Paris qui est encore une petite entreprise familiale, ne distribue pas encore Audi, mais… NSU. Et c’est précisément une Ro 80 « orange targa » qui me fait de l’œil en arrivant devant l’imposant terminal Charles de Gaulle. Un modèle iconique fraîchement restauré par Bauer avec la participation des élèves du Garac (une école nationale des professions de l’automobile), à l’initiative de François Allain, un ami de longue date depuis plus de 20 ans. Thierry Tanfin m’explique que cette première a été un acte déclencheur.
« Cela faisait un bon moment déjà que nous réfléchissions à ouvrir un département « tradition » à l’attention de notre clientèle. Pour Bauer, cela a du sens, car l’histoire d’Audi en France est intimement liée à la nôtre. Et nous avons été souvent pionniers en France dans de nombreux domaines. D’ailleurs, Mr Daniel Urcun, le président fondateur du groupe Bauer, a été parmi les tout premiers investisseurs à œuvrer pour séparer les marques Audi et Volkswagen. Le groupe Bauer est bien à l’origine d’Audi en France avec, à l’époque, un point de vente exclusif basé à St Ouen, qui existe toujours ! En ce qui nous concerne, cette branche vintage est pleinement légitime, et nous allons tenter de couvrir au mieux la riche histoire de la marque ». Un engouement qui semble partagé par de nombreux amateurs, puisque pas moins d’une dizaine de projets de restauration se profilent déjà à l’horizon, y compris avec des modèles populaires, comme une modeste berline 100 des années 80 !
Cette NSU Ro 80 qui pointe le bout de son nez marque le début d’une nouvelle aventure pour Bauer, tournée vers la restauration du riche patrimoine de la marque.
Voilà donc une clientèle et une nouvelle approche qui implique de fonctionner autrement qu’en appliquant le classique taux horaire habituellement mis en œuvre pour les interventions classiques. Un changement notoire confirmé par Thierry Tanfin. « Un projet de restauration peut réclamer des centaines d’heures de travail et s’étaler sur plusieurs mois, pour vraiment faire du sur mesure. Cela implique, après évaluation des travaux avec le client, de fonctionner plutôt au forfait, car facturer à l’heure sur de gros chantiers n’aurait aucun sens. Et si nous avons toutes les qualifications nécessaires pour nous occuper de la mécanique ou de la carrosserie, qui restent les principaux postes de dépenses lors d’une remise en état, nous devons faire sous-traiter quelques opérations très spécifiques que nous ne maîtrisons pas, comme le chromage ou la sellerie ».
Faire revivre les Audi du passé, voilà donc un challenge à la hauteur des ambitions du groupe Bauer. « Nous allons concentrer ces activités sur nos sites de Roissy et de St Witz, ce dernier étant surtout dédié à la carrosserie. Se pencher sur les anciennes, c’est reprendre pied avec la passion automobile, une valeur forte qui a toujours été présente chez nous, y compris chez nos proches collaborateurs (NDLR : voir nos 3 portraits ci-dessous). A terme, on aimerait bien être exclusif dans les restaurations sur les marques Audi et NSU ! ». Et quand on demande à Thierry Tanfin pour quelle Audi ancienne il en pince, sa réponse fuse instantanément : « celle qui porte mes initiales, un TT de la première génération ! ».
Le TT : un rêve de gosse !
Nicolas Beaudoin, contrôleur de gestion depuis 2 ans chez Bauer, n’est pas devenu « corporate » pour bien se faire voir, mais d’abord pour assouvir l’un de ses rêves de gosse ! « Quand j’étais jeune, sans le permis, l’une de mes premières voitures de collection a été en miniature le premier TT en roadster, doté des fameuses jantes paraboles. Mais avant de franchir le pas « pour de vrai », je me suis fait plaisir sur 2 roues, avec une belle moto. J’apprécie vraiment les beaux moteurs et les sensations fortes. C’est ainsi que l’an passé, je suis enfin passé à l’acte en achetant ce TT coupé, un V6 3.2 « gris Dolomite » de 2005 équipé de la boîte DSG et des jantes « Florence ». C’est ma première Audi et ce n’est que du bonheur. Je l’utilise en voiture plaisir, pour mes sorties le week-end, ou en vacances. Outre sa ligne de concept-car homologué pour la route, j’adore le son du moteur ». A la question tueuse que prendrait-il s’il devait le remplacer, Nicolas répond du tac-au-tac : par un RS Q3 ou un… TT roadster de première génération, identique à ma miniature de collection ! ».
Chez Bauer, l’amour des anciennes se pratique au quotidien pour Sylvie, amoureuse de sa belle A4 Avant V6.
A4 Avant : un daily driver for ever
On peut dire que Sylvie Blanchart fait partie des murs du groupe Bauer, puisque cela fait plus de 20 ans qu’elle y travaille, toujours avec le même entrain. Aujourd’hui « responsable qualité et formation », Sylvie a forcément un œil attentif lorsqu’il s’agit de se motoriser, et là encore, on peut dire qu’elle fait preuve de constance dans la durée puisqu’elle a son A4 Avant depuis… 2009 ! « C’est une sobre et puissante V6 3.0 TDI quattro de 2007 équipée de la boîte Tiptronic. Avec ses 233 ch à disposition, cette auto assure toujours de belles relances, tout en sachant flatter l’oreille. Et question consommation, il n’y a rien à dire, celle-ci se stabilisant à 7 l/100 km ». Au chapitre « gros frais », Sylvie avoue n’avoir fait que l’entretien courant, et une peinture intégrale voilà 2 ans « pour lui redonner l’éclat de sa jeunesse ». C’est réussi, et ce, même si son auto avoue fièrement aujourd’hui… 396 000 km. Forcément, viendra bien un jour où il faudra songer à la remplacer, mais pour Sylvie, l’idéal serait « le plus tard possible ! ». En attendant, elle profite de son A4 la semaine, et d’un TT roadster 1.8 turbo de première génération le week-end, en compagnie de son mari. Si ça ce n’est pas aimer les anciennes Audi…
Si Patrick est un mécano hautement qualifié ayant l’agrément pour intervenir sur les R8, son petit plaisir personnel reste de remettre en état sa vieille S3.
Matière grise
Malgré son jeune âge, Patrick Da Cunha est technicien Audi Sport chez Bauer. En clair, il est habilité à travailler sur les modèles RS et les supercars R8 ! Autant dire que bricoler sur une S3 de première génération ne lui fait pas peur, et c’est donc en parfaite connaissance de cause qu’il a acheté ce modèle à rafraîchir juste avant le premier confinement. Un chantier parfait pour s’occuper sainement ! « J’ai sorti le moteur, et je l’ai ouvert pour presque tout remplacer par du neuf, comme les soupapes, le joint de culasse, le variateur d’arbre à cames, les joints de boite mais aussi tous les silent blocs des trains roulants. Tant que j’y étais, j’ai même refait le bloc clim, la distribution, l’embrayage, les segments et les coussinets ! ». De quoi transfigurer sa voiture et la faire repartir pour plus de 150 000 km ! Car Patrick, amoureux de sa S3, va probablement la garder un bon bout de temps. « J’adore son gabarit compact, mais aussi sa ligne et ses performances élevées. Et ce youngtimer reste encore relativement simple à entretenir, du moins avec mon niveau de compétence et les bons outils ».