Chez Audi, l’A7 Sportback s’adresse aux hédonistes, ceux qui placent au rang de leurs priorités la beauté, l’exclusivité et le plaisir de conduite. Cela passe par une auto basse, large et effilée, qui change diamétralement des SUV, en prenant la forme d’un coupé-berline. Une Audi belle, qui se fait rebelle en devenant RS7 !
Par Joseph Bonabaud, photos Jack Seller
En bref
Nouvelle Audi RS7
Seconde génération
Moteur V8 4.0 biturbo de 600 ch
Performances : 0 à 100 km/h en 3,6 sec
Vitesse maxi de 250 à 305 km/h
Marre de la profusion, à toutes les échelles, de ces parpaings surélevés qui entrent dans la catégorie fourre-tout des SUV ? Comme on vous comprend ! Distinguez-vous en allant à contre-courant de cette tendance en optant pour, au contraire, une belle auto posée au ras du sol. Chez Audi, il y a pléthore de modèles répondant à cette définition, de l’inclassable TT à la supercar R8 en passant par la vaste famille des berlines et des breaks, plus faciles à vivre pour une petite famille. Mais au-delà de ces grands classiques, il existe depuis 2010 un modèle vraiment à part, totalement renouvelé en 2018, répondant au nom d’A7 Sportback. Si elle partage sa plateforme, ses moteurs et tous ses éléments techniques avec sa grande sœur A6, la plus élitiste A7 cultive pourtant sa propre personnalité. Il faut bien avouer que, sur la forme, elle n’a plus grand-chose à voir.
On pourra lui reprocher une ligne moins pure que la première mouture, la nouvelle A7 ayant la dure mission de séduire autant en Europe qu’en Asie, en passant par le Moyen-Orient. Ainsi, on regrette le manque de sobriété de l’arrière, qui s’orne désormais d’un bandeau lumineux courant sur toute la largeur, et qui se fend, de nuit, d’un petit cérémonial séquentiel lorsque l’on déverrouille la voiture.Ca ne sert à rien, excepté à flatter l’égo ! Mais malgré ces dérives un brin « bling-bling », l’esprit « A7 » est préservé, notamment à travers ce profil fuyant et élancé s’étalant sur plus de 5 mètres de long, ne dépassant pas 1m42 sous la toise. On a bien affaire à un coupé-berline, comme l’attestent ses 4 portes dépourvues de montant, et son large hayon s’ouvrant sur un coffre profond. Et l’intérieur, bardé d’écrans numériques et tactiles, a tout d’une vitrine technologique. En fait, en tant que super haut de gamme, l’A7 ne concède pas grand-chose par rapport à la limousine A8, que ce soit en connectivité, en infodivertissement ou aides à la conduite (une trentaine de dispositifs sont proposés). Le tout, bien sûr, sans perdre de vue l’essentiel : le plaisir de conduite, la planche de bord étant orientée vers le conducteur. Mais depuis la rentrée, on a aussi affaire à une super-GT, l’A7 Sportback se faisant enfin RS7 !
Dopée aux amphétamines
Ce qui est sûr, c’est que s’il existait un contrôle anti-dopage destiné aux voitures, la RS7 mettrait la jauge directement dans le rouge écarlate et serait positive ! Lorsqu’on la découvre, sans même la connaître, on devine immédiatement son caractère belliqueux, tant elle ne peut cacher plus d’une seconde sa généreuse musculature. Désormais, impossible de confondre cette variante survitaminée avec une « simple » A7 en finition S Line dotée de jantes larges. En fait, la RS7 duplique la recette pimentée et efficace déjà appliquée à la RS6. Ainsi, les ailes avant et arrière sont sensiblement élargies (+4 cm), chose utile pour accueillir d’énormes roues de 21 pouces minimum (jusqu’à 22’’ en option). L’arrière, partie que vous devriez apercevoir le plus souvent (mais furtivement le temps d’un dépassement éclair !), se distingue par ses soubassements très travaillés, intégrant un diffuseur d’air en forme de vague, et deux énormes sorties d’échappement ovales. Pour préserver la ligne fast-back, Audi a pris soin de masquer l’aileron, un appendice disgracieux mais indispensable pour générer de l’appui, celui-ci ne se déployant automatiquement qu’à partir de 100 km/h. Quant à l’avant, franchement menaçant, il se dote notamment de généreuses entrées d’air creusées dans le bouclier, indispensables pour gaver le moteur en air frais.
Ce n’est pas du luxe, dans la mesure où Audi a prélevé dans sa banque d’organes ce qui se fait de mieux : un fantastique V8 4.0 biturbo, celui-là même qui anime les bestiales RS6 et RS Q8. Accessoirement, c’est le même bloc, quoiqu’un peu dégonflé, que l’on trouve sous le capot du Lamborghini Urus. Rassurez-vous, avec encore 600 équidés à disposition, soit 40 ch de plus qu’auparavant grâce notamment à la greffe d’une paire de turbos à double spirales soufflant plus fort, il y a largement de quoi doubler sereinement tout ce qui roule. Et se faire plaisir ! Ainsi, Audi annonce seulement 3,6 secondes pour expédier l’exercice du 0 à 100 km/h, soit un dixième de moins que l’ancienne Porsche 911 GTS qui ne donnait pourtant pas l’impression de traîner. Quant à la vitesse maximum, « c’est vous qui voyez » comme dirait l’autre : 250 km/h reste le minimum syndical, mais en prenant le Pack Dynamic, le curseur grimpe à 280 km/h, voire même 305 km/h en Pack Dynamic Plus. Impressionnante à contempler, la RS7 est beaucoup moins intimidante en découvrant son intérieur.
Cet habitacle, assez sobre, se limite essentiellement à l’adoption de quelques logos « RS » (seuils de portes, volant, appuie-têtes…), complété par des sièges sport en cuir gaufré et perforés, surpiqués de rouge. Le fameux cockpit virtuel bénéficie d’un affichage spécifique (avec compte-tours en forme de « crosse », indicateur de « G »…), et une touche « RS mode » permet, en plus de l’Audi Drive Select, de paramétrer à peu près tout indépendamment sur la voiture, tout en rendant le pilotage plus agressif. Et au jeu des options, toujours très nombreuses chez Audi – y compris à ce niveau de gamme – on peut agrémenter la RS7 de placages en carbone véritable, mais aussi de raffinements techniques tels que le très efficace « Dynamic Ride Control », jugulant le roulis et le tangage, ou encore les freins en carbone-céramique, impressionnants avec leurs énormes disques de 440 mm (et 10 pistons à l’avant !), permettant de gagner quelques 34 kg. La voiture accusant 2065 kg à vide sur la balance, c’est toujours ça de pris à l’ennemi !
Jet… 7 !
Avec une écurie de 600 ch, on s’attend bien légitimement à une déferlante de décibels au démarrage. Et bien, c’est… perdu ! Certes, il y a bien un bourdonnement sourd à l’échappement, et il y a peu de chance de confondre à l’oreille une RS7 avec le Scénic TCe du voisin. Mais honnêtement, un TT RS (ou RS Q3), équipé du 5 cylindres « turbo » maison, chante plus fort encore ! Sur ce point, la récente BMW M8 Gran Coupé et surtout, l’explosive Mercedes AMG GT 4 portes, seules rivales directes, sont bien plus volubiles ! Plus démonstratives, certes, mais pas plus rapides…
Plutôt que de faire dans le spectaculaire, la RS7 préfère abattre la carte de l’efficacité. Le moteur, fort en couple (800 Nm constants de 2050 à 4500 tr/mn), vous assène des uppercuts sans jamais fatiguer, et ce d’autant plus qu’il est admirablement servi par une boîte Tiptronic à 8 rapports impossible à prendre en défaut. Et bien entendu, la transmission intégrale quattro, livrée ici d’office (de type Torsen, avec différentiel central mécanique), est un sacré allié pour aider à passer toute la puissance au sol. Les 600 ch sont distribués à très haut débit sur chacune des 4 roues, et il n’y a pas de gâchis avec de la déperdition au sol ! Le plus dingue est que cette catapulte capable de dépasser les 200 km/h sur un claquement de doigts se laisse très facilement apprivoiser. Bien qu’encombrante, et lourde (plus de 2 t, rappelons-le), la RS7 fait preuve d’une agilité surprenante, assez pour repousser les lois de la physique et déposer une très bonne petite GTI sur un parcours sinueux. Bien sûr, au-delà de cet aspect assez déroutant sur un engin de ce gabarit, la RS7 sait aussi prendre soin de ses occupants dans la plus grande discrétion et à faible allure, en sachant parfaitement tenir son rang parmi les limousines feutrées et autres GT très haut de gamme. Les membres de la Jet Set ne seront pas dépaysés !
L’avis d’Avus
Plus qu’une simple voiture, la RS7 est une véritable démonstration de force et fait montre de toute la maîtrise d’Audi à une altitude très élevée, qui échappe à la plupart des constructeurs. Mais de nos jours, le talent est hélas bien mal récompensé, surtout en France lorsqu’il s’agit d’automobile ! Car malgré d’indéniables efforts, pour rendre acceptable ce V8 de feu aux yeux des khmers verts (avec notamment l’adoption de la coupure partielle des cylindres à faible charge, ou même une hybridation légère 48V), il ne fait aucun doute que cela ne suffira pas pour échapper au malus maximum, qui explose dès le 1er janvier 2021 de 20 000 à… 40 000 € (voir édito). Un coup dur, pour ne pas dire plus, de porté à cette RS7 qui ne méritait pas tant de haine. Car, vous vous en doutez, un tel engin d’exception (52 CV) n’est pas franchement à la portée de toutes les bourses : avec un prix de départ fixé à 139 000 €, il est clair que la RS7 est promise à rester confidentielle sous nos cieux…
Caractéristiques techniques
- Moteur : 8 cylindres en V biturbo, 3996 cm3, 32v
- Puissance maxi (ch à tr/mn) : 600 à 5700
- Couple maxi (Nm à tr/mn) : 800 à 2050
- Transmission : aux 4 roues (quattro avec Torsen), boîte Tiptronic à 8 rapports
- Freins Disques ventilés, étriers à 4 pistons (AV et AR), disques
- carbone en option
- Dimensions L x l x h (m) 5,00/1,95/1,42
- Poids (kg) 2065
- Volume du coffre (litres) 535
- Pneus AV/AR 275/35 R 21
- Vitesse maxi (km/h) 250 (autolimitée, 305 km/h en option)
- 0 à 100 km/h (sec) 3,6
- Émissions CO2 (g/km) 257
On aime
- Gueule impressionnante
- Performances de dingue !
- Facilité et efficacité de conduite
- Qualité de fabrication, dotation
On aime moins
- Prix et malus décourageants
- Piège à permis !
- V8 pas assez sonore
- Options trop nombreuses