Si la Golf GTI a ouvert une voie en proposant des performances de premier plan à bord d’une berline compacte, l’Audi S3 a creusé un peu plus ce sillon, à une autre échelle. A l’occasion de la sortie du 4ème opus, nous avons voulu le confronter, en exclusivité, à son ancêtre. Un fringuant exemplaire de 1999, lui aussi d’un bleu éclatant…
Par Joseph Bonabaud, photos Jack Seller
En bref
Face à face entre la 1ère S3 et la dernière de 4ème génération
Puissance : de 210 à 225 ch ch (S3 Mk1) à 310 ch (S3 Mk4)
Nouvelle S3 déclinée en Sportback et en berline
Nouvelle S3 disponible à partir de 55 900 €, malus de 2200 €
S’il aura fallu attendre la seconde génération d’A3 pour voir débouler un méchant dérivé RS, la déclinaison sportive « S » est en revanche apparue dès le départ. Ses débuts, en 1999, peuvent sembler modestes, avec la greffe d’un 4 cylindres 1.8 turbo 20 soupapes de 210 ch, livré déjà d’office avec la transmission intégrale quattro (avec Haldex). Et pourtant, c’était bien une chose unique à l’époque sur le segment. Seul Volkswagen s’était une fois de plus risqué dans cette voie, avec sa Golf VR6 apparue en 1991, sauf que celle-ci plafonnait à « seulement » 174 ch. Cela faisait déjà autorité à l’époque, alors imaginez quand Audi a lancé la première S3, qui osait dépasser le cap symbolique des 200 ch avec son 1.8 turbo 20v (210 ch), un moteur plein de fougue qui fera par ailleurs le bonheur du premier TT quattro. Malgré cette cavalerie plus que respectable, Audi ne s’endormira pas sur ses lauriers, la puissance culminant à 225 ch après le léger restylage effectué en avril 2002, une caractéristique qui concerne le sublime exemplaire « bleu Nogaro » que vous avez devant les yeux.
Vingt ans plus tard, il faut avouer qu’elle fait toujours son effet cette S3 avec ses ailes subtilement élargies, bien remplies par de belles jantes spécifiques Avus de 17 pouces, et sa double sortie d’échappement intégrée au bouclier arrière. Tout cela magnifie sa ligne de petit break de chasse, disponible à l’époque en 3 portes. Et outre de discrets logos spécifiques « S3 », les spécialistes auront remarqué la présence des coques en alu brossé habillant les rétroviseurs, un signe distinctif toujours disponible de nos jours sur les Audi siglées « S ». Mais à force de gagner au fil des ans des équipements de confort et de sécurité, mais aussi de grossir, l’Audi S3 n’a pas eu d’autre choix que de muscler sensiblement son jeu, génération après génération. Dès la seconde mouture lancée en 2004, Audi proposait ainsi 265 ch, une puissance augmentée à 300 ch tout rond sur la 3ème version apparue en 2014 ! Cela nous amène à ce 4ème et dernier opus, qui monte encore le curseur d’un cran question puissance. Ce qui renforce encore l’écart avec notre doyenne… Même si cette bombinette reste fidèle à un 4 cylindres suralimenté (un 2.0 TFSI), elle bénéficie d’une centaine de chevaux en plus dans la salle des machines.
Avec 310 équidés (soit 10 de plus que sur la précédente version), la S3 cru 2021 ne compte pas amuser le terrain ! Mine de rien, c’est juste 30 ch de moins que la première radicale RS3, et en l’état, elle laisse derrière la récente Renault Mégane RS restylée (300 ch), référence du segment et même, de peu, ses rivales teutonnes les plus directes, incarnées par les BMW M135i et Mercedes A 35 AMG (306 ch toutes les deux) ! Sur la forme, cette « super-GTI » cultive comme sa devancière un air canaille, même si elle a depuis – signe des temps – mis aux oubliettes la sexy carrosserie 3 portes qui faisait le sel de notre premier exemplaire, faute de ventes suffisantes. Mais Audi ne met pas pour autant tous ses œufs dans le même panier. Désormais, la S3 peut se déguster en berline tricorps allongée à 4m50, assez jolie malgré un certain classicisme assumé. Mais en Europe, on la verra, comme ici, plus fréquemment en petit break 5 portes baptisé Sportback, un poil plus compact (4m34). Mais pas forcément dans cette livrée qui claque, baptisée « Bleu Turbo »…
Deux flacons, une ivresse
Ancienne ou moderne : même combat, l’objectif restant d’offrir un maximum de plaisir au conducteur. Et cela passe d’abord par le plaisir des yeux ! Pour cette ultime génération, Audi s’est évertué à donner plus de volume à la carrosserie, notamment au niveau des flancs, particulièrement sculptés. En tournant autour, en jouant avec les reflets de lumière, on remarquera instantanément les ailes bombées, contribuant à mieux « asseoir » visuellement la voiture. D’ailleurs, avec l’adoption d’office d’un châssis « sport » abaissé de 15 mm, et de belles jantes larges de 18 pouces (19 pouces en option), la S3 paraît naturellement posée au ras du sol. Pour se démarquer des A3 normales, la S3 gagne quelques coquetteries exclusives, comme une calandre noire à nid d’abeille large et basse, cernée par de généreuses écopes intégrées sur les côtés du bouclier. Clairement, en voyant cette proue frondeuse et menaçante, on comprend parfaitement que cette S3 envoie un message sans préavis à celui qui aurait l’insolence de se traîner devant ! En se rangeant sagement, il pourra ainsi contempler l’arrière en train de s’éloigner rapidement, celui-ci se distinguant essentiellement par la présence de deux doubles sorties d’échappement encadrant un diffuseur d’air.
Comparé au traitement exclusif propre à la S3 de première génération, qui ose égayer son habitacle en greffant au cuir de sublimes « peaux » en alcantara assorties à la teinte de la carrosserie, l’intérieur de la nouvelle version est moins spectaculaire, même s’il tente de marier un univers chic et sport. Outre un volant à méplats et des sièges enveloppants habillés de cuir surpiqué, on note l’adoption d’inserts en aluminium. Comme à l’accoutumée, sur l’ancienne comme la nouvelle S3, tout respire la qualité, avec des matériaux parfaitement ajustés. Mais on mesure le « gap » technologique entre ces 2 modèles, la première S3 restant ancrée dans le siècle passé avec ses compteurs à aiguilles et l’absence d’écran tactile. Tout le contraire de la nouvelle, qui brille par sa haute technicité comme l’atteste sa planche de bord digne d’un Airbus, « nettoyée » de la plupart des boutons. Mais contrairement à sa cousine, la nouvelle VW Golf (de 8ème génération), qui est allée jusqu’à tout supprimer, l’A3 a eu la sagesse de conserver quelques commandes physiques en guise de raccourcis. Et celles qui sont tactiles bénéficient d’un « retour haptique » (une vibration et un petit « clic » valide chaque opération), ce qui rend l’ensemble nettement plus intuitif et ergonomique.
Côté position de conduite, rien à dire, tant on se sent bien à bord de l’une ou de l’autre, mais la nouvelle S3 garde l’avantage au niveau de l’habitabilité, et pas seulement aux places arrière. Si le conducteur a face à lui des compteurs numériques à affichage variable (cockpit virtuel), au centre de la console trône un grand écran tactile de 10,1 pouces. C’est en fait une véritable « tour de contrôle » destinée à gérer notamment l’infodivertissement (avec navigation via Google Earth, et comptabilité Androïd Auto et Apple CarPlay), mais aussi la communication « car to X », c’est-à-dire que la voiture peut communiquer avec certaines infrastructures, en temps réel. Mais nous, la communication qui nous tient à cœur, c’est celle existant entre la machine et le pilote ! Un point de vue qui a, vous en conviendrez, son importance sur une S3…
Compacte attaque !
Si les options disponibles pourraient composer un catalogue épais comme celui des Trois Suisse, sachez que la boîte S-tronic à 7 rapports, seule boîte disponible sur la nouvelle S3, ainsi que la transmission intégrale quattro (de type Haldex de 5ème génération), sont d’office du voyage. On ne s’en plaindra pas, cet équipage étant très efficace. Ce n’est pas du luxe, ce 2.0 TFSI à la santé débordante délivrant pas moins de 400 Nm de couple dès 2000 tr/mn ! Autant dire que lorsque l’on écrase, d’un coup, la pédale de droite, les 1500 kg de l’ensemble semblent bien légers, tant on est scotché au fond des sièges ! En trouvant immédiatement du grip, la nouvelle S3 efface le 0 à 100 km/h en 4,8 secondes, sans remontée de couple désagréable, la vitesse maxi restant bridée électroniquement à 250 km/h. Certes, avec plus de 300 ch sous le capot, on n’en attendait pas moins.
Cela étant, malgré un déficit de puissance de près de 100 ch, notre grand-mère ne se laisse pas abattre pour autant ! Outre le fait qu’elle a la chance de ne pas devoir se fader un filtre à particules, toujours castrateur pour la mécanique, la première S3, naturellement bien plus dépouillée, est forcément plus légère. Et pas qu’un peu, puisqu’elle accuse moins de 1200 kg sur la balance avec les pleins ! Mais cela ne suffira pas pour tenir le rythme de la nouvelle S3. Car en plus de devoir composer avec un important déficit de puissance, notre S3, dotée elle aussi d’une transmission intégrale quattro, doit composer avec une boîte manuelle à 6 rapports. Celle-ci est bien guidée et étagée, mais en rapidité, elle ne peut rivaliser avec la S-tronic qui dégaine plus vite que son ombre. Résultat des courses, notre vieille S3 met 6,6 secondes pour parcourir le 0 à 100 km/h, tandis que la vitesse maximale est donnée à 243 km/h.
Mais là où le temps a été le plus cruel avec notre ancêtre, c’est bien au niveau du comportement routier. Sur ce point, on constate qu’Audi a réalisé d’immenses progrès en une vingtaine d’années. Car là où notre première S3 se dandine sur les bosses et tressaute, parfois, sur les mauvais raccords de chaussée, la nouvelle semble presque absorber les irrégularités, en offrant un confort étonnant, et ce, malgré une monte pneumatique bien plus généreuse. Un miracle que l’on doit aux réglages rendus possibles par l’Audi drive select, mais aussi à l’amortissement piloté. Forcément, la vieille S3, plus basique en n’étant que mécanique, ne peut compter sur la fée électronique, et doit donc largement s’incliner sur ce domaine. Idem pour la tenue de route, la nouvelle S3 bénéficiant de voies élargies, mais aussi de nombreuses pièces en aluminium au niveau des trains roulants, ceci afin de réduire les masses suspendues. De quoi la métamorphoser en redoutable centrifugeuse dans les virages. Et oui les jeunettes ne respectent rien !
L’avis d’Avus
Ne soyons pas trop durs avec cette S3 de première génération, qui a eu le mérite de montrer la voie à suivre, tout en créant la niche des « super-GTI ». Et à l’époque, pas une voiture de sa catégorie ne lui arrivait à la cheville. Et beaucoup, du segment supérieur, pouvaient lui envier toutes ses qualités. Une suprématie que cultive parfaitement la nouvelle S3, même si, depuis, elle a été rejointe par nombre de rivales qui lui envient toujours sa remarquable polyvalence. C’est ce que l’on appelle la rançon du succès !
Merci à Dimitri Bierce du Roc Racing Historic (01 39 53 27 10, www.roc-racing-historic.fr) pour la mise à disposition de sa sublime S3 de première génération…
Caractéristiques techniques
Audi S3 « Mk1 », (modèle 2002)
- Moteur : 4 cylindres turbo 20V de 1781 cm3
- Puissance (ch à tr/mn) : 225 à 5900
- Couple maxi (Nm à tr/mn) : 280 à 2200
- Transmission : aux 4 roues (quattro)
- Boîte mécanique : à 6 rapports
- Freins : 4 disques ventilés, ABS
- Pneus : 225/45 WR 17
- Dimensions (L x l x h) en m : 4,16 x 1,76 x 1,42
- Poids à vide (kg) : 1185
- Coffre (litres) : 270
- Réservoir (litres) : 62 litres
- 0 à 100 km/h (sec) : 6,6
- Vitesse maxi (km/h) : 243
On aime
- Ligne toujours séduisante
- Présentation intérieure
- Conduite vivante
- Cote encore attractive
On aime moins
- Souvent massacrée…
- Amortissement perfectible
- Pièces spécifiques introuvables
Audi S3 « Mk4 », (modèle 2021)
- Moteur 4 cylindres turbo de 1984 cm3, injection directe
- Puissance (ch à tr/mn) 310 à 5450
- Couple maxi (Nm à tr/mn) 400 à 2000
- Transmission aux 4 roues (quattro)
- Boîte S-tronic à 7 rapports
- Freins 4 disques ventilés, ABS
- Pneus 225/40 R 18
- Dimensions (L x l x h) en m 4,35 x 1,81 x 1,43
- Poids à vide (kg) 1500
- Coffre (litres) 325
- Réservoir (litres) 55 litres
- 0 à 100 km/h (sec) 4,8
- Vitesse maxi (km/h) 250
On aime
- Esthétique séduisante (berline et Sportback)
- Comportement sûr et dynamique
- Qualité de construction, ergonomie
- Technologies embarquées
On aime moins
- Plus de carrosserie 3 portes
- Options chères et nombreuses
- Malus dissuasif…