Audi e-tron quattro 2018
Vers un élevage en batterie
Audi nous aura fait un long teasing en dévoilant, pas à pas, son révolutionnaire e-tron quattro. Premier véhicule 100% électrique, ce SUV à la ligne élancée a vu sa production débuter à l’usine de Forest, en Belgique. Sa mission : court-circuiter les Jaguar I-Pace et autres Tesla Model X…
En bref
1er véhicule 100% électrique Audi
2 moteurs électriques, puissance cumulée de 320 kW (435 ch), 561 Nm
Autonomie : 400 km environ (cycle WLTP)
Déjà disponible à la commande (prix à partir de 79 900 € en Allemagne)
L’e-tron quattro nous parvient enfin, sans camouflage ! Après une brève apparition en mars dernier, au salon de Genève, il devait faire son entrée dès cet été, mais l’incarcération surprise de Rupert Stadler, le big boss, a quelque peu contrarié les plans d’Audi. Un retard à l’allumage qui a profité à Jaguar, trop heureux de griller la politesse à Audi en lançant son I-Pace. Un SUV premium, à l’instar du Model X de Tesla, et cela s’explique pour des raisons simples. Primo, la technologie étant encore à ses débuts dans ce domaine, il est plus aisé de caser un encombrant pack de batteries dans un gros véhicule, qu’à bord d’une citadine. Deuxio, ces batteries, forcément très lourdes, seront naturellement mieux réparties dans un gros SUV, de surcroît surélevé et doté de suspensions renforcées. Enfin, tertio, cette technologie étant encore chère, elle est plus facile à vendre sur un véhicule familial premium que le contraire !
Révolution silencieuse
Désormais, pour acheter son mixeur, il ne sera plus nécessaire d’aller chez Darty ! Plus sérieusement, l’e-tron quattro (prononcez « itronne » à l’anglaise pour éviter tout fâcheux jeu de mots) est resté très proche de l’étude du même nom, dévoilée en 2015. Ce qui est plutôt une bonne chose, ce SUV offrant 5 places et un grand coffre apparaissant comme particulièrement élancé. De nombreux éléments stylistiques caractérisent cet engin électrifié, comme la calandre spécifique à barrettes verticales, ou encore le bouclier arrière, dépourvu naturellement de sorties d’échappement, mais il reste assez proche en apparence d’un SUV Audi thermique, au contraire de Mercedes qui a choisi de doter ses véhicules électriques (gamme EQ) d’un design très différent. Objectivement, l’e-tron quattro affiche des proportions équilibrée, à la façon d’un Range Velar, et il fait envie, ce qui est l’essentiel.
Doté de batteries au lithium-ion de 95 kWh composées de 36 modules et 432 cellules, ce grand SUV de 4m90 de long (soit une longueur comprise entre un Q5 et un Q7) propose des performances de haute volée, avec seulement 6,6 secondes en mode classique pour abattre le 0 à 100 km/h et 200 km/h en pointe, la vitesse étant bridée électroniquement. Car pour couvrir un rayon d’action annoncé à 400 km (de surcroît en cycle réaliste WLTP), on imagine bien qu’il faudra être un adepte de l’écoconduite et éviter les accélérations rageuses à répétition ! A noter que ces batteries tolèrent une charge rapide sur des bornes d’une puissance de 150 kW, permettant de récupérer 80% d’énergie en à peine 30 minutes. Seul « hic », sur les 25 000 bornes présentes sur l’hexagone, celles-ci se font bien plus rares que des radars. On en dénombre seulement… 2 en France, mais Audi promet d’en installer une quarantaine avant la fin de l’année. Pour l’heure, dans la vraie vie, il faudra compter 8h30 pour une recharge « normale » à son domicile, sur une prise délivrant seulement 11 kW de puissance. A partir de la mi-2019, Audi proposera, en option, un super-chargeur deux fois plus puissant (22 kW), divisant le temps de recharge par deux (4h30).
Le monde pour terrain de jeu
Heureusement, Audi et ses meilleurs ennemis (Mercedes et BMW), développent conjointement en parallèle un réseau de bornes « Ionity » encore plus puissantes (350 kW), pour soutenir les développements conjoints de leurs futurs véhicules électriques.Afin d’éviter un nouveau scandale de type « dieselgate », Audi semble avoir pris mille précautions pour ne pas se louper. Déjà, en lançant dans la nature 250 prototypes rouler dans des conditions extrêmes sur 4 continents, le constructeur a emmagasiné un incroyable retour d’expérience : plus de 5 millions de kilomètres, soit 125 tours du monde et 85 000 heures de conduite ! Et pour optimiser l’autonomie, les ingénieurs d’Audi ont beaucoup travaillé sur les capacités de régénération de la voiture sans nécessairement passer par la case « recharge ». Au mode automatique s’ajoute un mode manuel, permettant de choisir entre trois modes de régénération via un système de palettes au volant. En fonction du niveau choisi, l’intensité du frein moteur sera plus ou moins importante pour doper la récupération d’énergie. Selon Audi, le mode régénération peut atteindre jusqu’à 220 kW, et il permettrait d’augmenter jusqu’à 30 % l’autonomie.
Pour mouvoir l’imposant e-tron, et justifier pleinement son appellation « quattro », Audi le dote de deux moteurs électriques asynchrones (produits sur son site de Hongrie), entrainant en simultané les 4 roues. On retrouve un moteur par essieu, pour équilibrer les masses, et ils délivrent jusqu’à 320 kW (soit 435 ch) et 561 Nm en puissance combinée. Le conducteur pourra même activer une fonction « boost », pendant 8 secondes maximum, pour obtenir un gain significatif de puissance, l’e-tron pouvant alors accélérer cette fois en 5,7 sec sur le 0 à 100 km/h, la barre des 200 km/h restant toujours un maximum.
Demain, c’est maintenant !
Premium oblige, l’Audi e-tron intègre bien évidemment un panel d’équipements d’assistance. En fonction des options choisies, il peut embarquer jusqu’à cinq radars, six caméras, douze capteurs à ultra-son ainsi qu’un scanner laser qui « lit » les obstacles sur la route, fixes ou mobiles. Et à l’instar des dernières productions haut de gamme des Anneaux (A6, A7, Q8), l’e-tron reçoit une instrumentation 100% numérique. Mais l’Histoire se souviendra que l’Audi e-tron est la première voiture de série à proposer (en option bien sûr !) un dispositif de caméras en lieu et place des traditionnels rétroviseurs ! Celui-ci permet de réduire de 15 cm la largeur du véhicule, tout en diminuant sensiblement la trainée. Installées en lieu et place des rétroviseurs, ces caméras projettent leurs images à très haute résolution sur deux écrans OLED de 7 pouces situés à bonne hauteur dans les portières (voir notre dossier sur les innovations). Bien sûr, ce SUV sera livré d’office avec des rétroviseurs normaux, là où la réglementation impose leur présence, comme aux USA.
Car l’e-tron quattro a bien sûr une vocation internationale, et partout, il lui faudra lever quelques inquiétudes légitimes, comme celle « du fil à la patte », avec une autonomie qui peut paraître limitée pour un véhicule à vocation familiale. A ce sujet, il est regrettable qu’Audi n’ait pas intégré un petit moteur thermique, en guise de générateur et de prolongateur d’autonomie. Ce qui est sûr, c’est qu’il ne fait aucun doute que la voiture électrique n’aura un réel avenir que si les Etats et les constructeurs mettent les moyens au niveau des infrastructures. Parallèlement, il est indispensable que la technologie progresse sensiblement (notamment au niveau des temps de charge), tout en se démocratisant. A ce sujet, rien n’est moins sûr, un fort renchérissement du cours du cobalt et du nickel (qui entrent tous deux dans la composition des batteries) étant prévisible, face à l’afflux de la demande. En outre, il faudra solutionner également de manière convaincante les problèmes de pollution engendrés par les véhicules électriques, leur construction étant très énergivore, et leur dépollution posant un vrai problème au niveau des batteries, que l’on ne sait pas bien encore recycler. Enfin, dernier écueil à surmonter, parvenir à convaincre et motiver le réseau de diffuser cette technologie encore difficile à vendre. Bref, vous l’aurez compris, le chemin du succès est encore semé d’embûches pour ce SUV d’un nouveau genre. Etre un pionnier n’a jamais été aisé !
L’avis d’Avus
Annoncé à partir de 79 900 € hors option en Allemagne, l’e-tron quattro marque le tournant électrique pris par Audi. Ce n’est plus une option, mais une nécessité, si le constructeur (et ses concurrents !), veut échapper aux lourdes sanctions qui seront imposées par Bruxelles dès 2021. Pour ce qui est d’Audi, l’e-tron quattro n’est que la première pierre d’un vaste plan-produit, une berline de grand tourisme étant également confirmée (e-tron GT), et il ne fait aucun doute qu’Audi ira, à terme, occuper tous les segments du marché avec cette technologie. Reste une vraie interrogation : que vaut-il vraiment sur la route ? Réponse après notre premier essai, prévu pour début 2019…